samedi 30 avril 2022
Lu « Le sursaut », premier des trois tomes de « L’histoire intime de la Vème République » que Gallimard a commandé à Franz-Olivier Giesbert.
contemporains, nés la même année et que nos regards sur le monde convergent d’autant mieux , ou parce que nos pères furent de courageux combattants de la libération de la France, acteurs des deux débarquements ( le sien était un GI débarqué à Omaha Beach) ? Est-ce parce que sa mère, dont il était très proche, était une enseignante, prof de philo et socialiste et que cette influence l’a marqué peu ou prou ? Je ne sais trop… Mais j’apprécie sa grande connaissance de la vie politique contemporaine et ses éditos -ceux du « Point » depuis quelques années- qui cherchent à élever le débat. S’il lui arrive d’être sévère, très sévère, avec les responsables politiques c’est toujours avec un respect, et même une affection pour les personnes. Et s’il s’égare parfois à être définitif, il lui arrive aussi de reconnaître ses erreurs. Gallimard lui a donc commandé une « histoire intime de la Vème République » en trois tomes, le premier commençant par un portrait du seul Président que l’auteur n’ait pas du tout connu : De Gaulle. Alors il est parti aux meilleures sources, celles des ouvrages d’Alain PEYREFITTE, de Jacques Foccart, Philippe de Gaulle et tant d’autres pour en donner un portrait tout à fait étonnant où l’admiration évidente de l’auteur pour son sujet - et pour son œuvre !- ne l’empêche nullement de décrire ses incroyables défauts : caractériel, menteur, manipulateur, cynique évidemment, violent , parfois même à l’excès, mais aussi parfois dépressif et prêt à tout laisser tomber ou méprisant pour tel ou tel, voire telle ou telle catégorie de français. Il y a deux moments forts dans ce livre: l’Algérie et mai 68. L’Algérie et, en particulier, la relation très étonnante de contradictions et de trahisons réciproques entre De Gaulle et Salan ( un Salan, d’ailleurs, que Giesbert réhabilite presque…) , l’Algérie dont Giesbert démontre que, depuis le début, De Gaulle voulait se « défaire » ce qui l'a amené à dire des choses étonnement cyniques voir manipulatrices. Avec, en toile de fond, une sévérité invraisemblable du général pour les pieds noirs….et Mai 68 où l’on découvre De Gaulle usé, en bout de course, dépassé par les évènements, prêt à tout lâcher jusqu’à son escapade à Baden-Baden pour voir Massu et, là encore, très méprisant avec les français qui, décidément, ne le méritaient pas. Giesbert aime bien et, donc, châtie bien : il a aimé De Gaulle et l’assaisonne donc sans vergogne. On brûle de lire les deux autres tomes qui bénéficieront en plus des connaissances personnelles de l’auteur avec ses sujets d’intérêt . Je me souviens qu’il avait consacré un livre peu complaisant mais tout à fait honnête de Mitterrand dans les années 90 dont j’attends avec impatience la réécriture avec le temps qui passe….
lundi 25 avril 2022
Lu aussi, dans ces temps électoraux déprimants, « Le laboureur et les Mangeurs de vent » de Boris Cyrulnik paru chez Odile Jacob.
Or la servitude engourdit la pensée: quand on hurle avec les loups, on finit par se sentir loup…tandis que la liberté intérieur isole du groupe et il faut une bonne dose de confiance en soi pour tenter l’aventure - car c’en est une- de l’autonomie.
Boris Cyrulnik se place délibérément du côté d’ Hannah Arendt, quitte à évoquer la banalité du mal. Mais l’angoisse est le prix de la liberté.
Un livre plein de profondeur et de sagesse, pour continuer à apprendre à penser par soi-même, une quête jamais achevée.
Lu « le sens de notre Nation » de Bernard CAZENEUVE paru chez Stock,
les tout-meilleurs, qui ne s’arrête jamais à l’air du temps mais cherche à comprendre les mouvements de fond de la société française. Ça tombe bien , avec Bernard CAZENEUVE il a affaire à du « lourd » parmi les responsables politiques français, un des très rares qui ne se paye pas de mots, refuse la facilité et assume. Autant le dire, d’ailleurs: une vieille amitié, une vieille complicité, une vieille affection me lie à cet homme, pourtant beaucoup plus jeune que moi, en qui je reconnais des qualités qui me sont chères en politique.
Dans ce livre-entretien, il revient sur son expérience du pouvoir comme Ministre de l’Intérieur puis Premier Ministre , sous le quinquennat de François Hollande, dans une période très troublée où, aux attentats terribles qui endeuillèrent le pays succédèrent les manifestations nombreuses et violentes contre la loi-travail puis, plus tard, des manifestations de policiers plus ou moins manipulées par l’extrême-droite mais dont le caractère spectaculaire a marqué l’opinion… terrible période. Et l’on redécouvre un Ministre de l’Intérieur solide au poste, ferme et ouvert, puis un Premier Ministre digne, dans tous les sens républicains du terme. Bernard CAZENEUVE tel qu’en lui-même.
J’ai pourtant quelques désaccords avec l’auteur et il me pardonnera cette expression de ma liberté de pensée dans un océan de louanges : d’abord, et je le lui ai dit, je le trouve très indulgent avec François Hollande qui, en particulier avec ce livre « un Président ne devrait pas dire ça » a représenté tout ce que je déteste dans la vie politique et, en particulier, l’absence totale de sens de l’Etat. Mais que voulez-vous, Bernard CAZENEUVE fait profession de loyauté et ça, on ne peut pas lui en faire reproche quand tant de trahisons fleurissent en politique….j’ai d’autres désaccords sur la loi-travail dont je n’ai pas vécu l’histoire comme lui, au gouvernement, mais comme parlementaire de la majorité, et dont la première version nous était apparue tellement inacceptable - et, pour tout dire, provocatrice - à nous députés socialistes, que tout ce que nous avons amendé derrière était peine perdue : la première impression était hélas la bonne et l’opinion de gauche avait tranché; enfin j’ai un désaccord sur cette Fondation de l’Islam qu’il a proposée et mise en place et qui me parait être une mauvaise réponse à une vraie question: la loi de séparation de 1905 n’interdit pas seulement aux religions d’influer sur le pouvoir politique, elle interdit aussi au pouvoir de se mêler de religion ! Et a-t-on jamais créé une Fondation du catholicisme ou du protestantisme ? Mais de tout cela je parlerai avec Bernard car ce ne sont que des points précis dans un océan de convergences et, surtout deux axes comportementaux qui me paraissent essentiels au moment où sonnera, tôt ou tard, la reconstruction de la Gauche: le sens des responsabilités pour ne promettre que ce que l’on peut tenir et l’amour de la République, de ses valeurs et de sa culture.
Après cette désastreuse élection présidentielle qui nous a proposé un remake de 2017 en bien pire, après ce vote « contre » bardé de colère, après ce désastre de la gauche socialiste, lire ce livre a quelque chose de profondément réconfortant. Mais gare ! Le temps presse…
Tout le monde y allant de son commentaire pertinent et définitif sur le sens du vote de dimanche, je me contenterai de chiffres comparant les nombres de voix d’Emmanuel Macron et Marine Le Pen aux deuxièmes tours de 2017 et 2022:
Emmanuel Macron : 18,8 millions de voix le 24 avril 2022 soit deux millions de voix en moins que le 7 mai 2017
Marine Le Pen : 13,3 millions de voix soit 2,7 millions de voix en plus que le 7 mai 17.
Tout est dit dans ces chiffres non ?
dimanche 17 avril 2022
Deux pièces de théâtre lors de mon séjour parisien:
- Au théâtre de l’Oeuvre, « Dabadie ou les choses de nos vies » d’après l’œuvre de
Jean-Loup Dabadie, sur une mise en scène d’Emmanuel Noblet avec celui-ci, Clarika et Maissiat ( deux actrices-chanteuses) .
Un spectacle musical très original à partir de l’œuvre de Jean-Loup Dabadie, écrivain et dialoguiste, que l’on retrouve plus facilement dans les chansons dont il fut parolier que dans des extraits de dialogues de films. Mais Emmanuel Noblet est un homme de théâtre en permanente recherche, créatif prolifique, acteur passionné et, en l’occurrence, aux confins originaux de la chanson et du théâtre.
- Au cirque électrique,« Le sourire au pied de l’échelle » d’après
l’œuvre d’Henry Miller avec Denis Lavant, « seul en scène » sur une mise en scène de Bénédicte Nécaille.
Le cirque électrique est un drôle d’endroit de la Porte des Lilas, deux chapiteaux au-dessus du périphérique, une initiative de la mairie de Paris ( qui ne fait pas que des pistes cyclables !), pour le spectacle vivant qu’on dira « alternatif » autour du cirque et du théâtre. Un lieu investi en la circonstance par la compagnie « J’y retourne immédiatement » dirigée par Bénédicte Nécaille qui met en scène cette pièce sur un texte d’Henry Miller qui lui fut commandé par Fernand Légerpour illustrer ses peintures sur le clown: il vaut mieux se cramponner au bas de l’échelle que se griser d’élévation, telle est la conclusion du clown parti à la recherche de lui-même et placé devant ses contradictions. Le texte est irrégulier mais la mise en scène est très vivante et Denis Lavant époustouflant !
Lu « Dans les brumes de Capelans » d’Olivier Norek, paru chez Michel Lafon.
succès. Le roman policier est un genre littéraire à part entière et la France a la chance de disposer en ce domaine de plusieurs auteurs de talent à la renommée internationale. Olivier Norek est de ceux-là et il nous livre un nouveau roman qui, s’il a peut-être un peu de mal à démarrer, devient vite haletant et qu’on ne lâche plus . Une maitrise exceptionnelle du suspens qui est délicieuse. L’histoire est, une nouvelle fois, celle du Capitaine Coste, vieux flic cabossé par les accidents de la vie, sentimentale et professionnelle, qui se retrouve en semi-retraite à Saint-Pierre et Miquelon, en charge d’une résidence surveillée pour accueillir des « repentis », ces anciens criminels qui rompent avec leur histoire pour coopérer avec la police. Cas particulier : il s’agit cette fois pour Coste d’accueillir, protéger et faire parler une victime étonnement sauvée des griffes d’un multi-criminel; une jeune femme désarmante… Le décor somptueux de l’archipel français aux confins de Terre-neuve et, un moment envahi par les brumes de Capelans va ajouter au brouillard épais de l’énigme.
mardi 12 avril 2022
Vu, avant le dépouillement, le dernier film de Cédric Klapisch, « En corps » avec Marion Barbeau, Muriel Robin, Denis Podalydès, Pio Marmaï, François Civil…
une simple vue de l’esprit puisque , dans la vraie vie, l’actrice y est première danseuse. C’est d’ailleurs là, à l’Opera de Paris, que débute le film avec une longue séquence sans parole autour des répétitions, des coulisses et de la présentation de « La Bayadère « à laquelle Élise participe bien sûr. Mais, sans doute distraite, choquée, bouleversée parce qu’elle vient de surprendre en coulisses son compagnon tendrement enlacé avec une autre danseuse, Élise se blesse gravement. L’immobilisation s’annonce longue, l’opération chirurgicale probable, la carrière de danseuse très menacée. Début d’une période de résilience où se mêle un père (Denis Podalydès), vieil avocat retiré dans le Berry qui a du mal à dire « je t’aime » à ses trois filles et, en particulier à Elise, un kiné amoureux transi ( François Civil, très drôle) de la danseuse partie avec le compagnon d’Elise, un couple de copains d’Elise plutôt déjantés qui exploitent un food-truck et lui proposent un boulot de marmiton, et une retraitée dans un joli manoir breton ( Muriel Robin) où sont accueillis des artistes en résidence. Dont, un jour, une compagnie de danse contemporaine….qui va ramener lentement mais sûrement Elise vers la danse et l’amour. Ce film est d’une grande beauté, d’une formidable humanité, d’une tendresse réjouissante, d’une esthétique réussie. Quand on aime la danse comme moi on se réjouit. Si on ne la connait pas on la découvre, classique ou contemporaine pour une fois complémentaires et non pas artificiellement opposées, dans une jolie histoire où Marion Barbeau excelle. Actrice ou danseuse ? That is the question…
lundi 11 avril 2022
Premier tour de l’élection présidentielle ou la suite d’un désastre annoncé.
Je
parle évidemment du désastre de ma Gauche, la Gauche de
gouvernement, la gauche responsable, la gauche réformiste et
européenne.
Je
l’ai dit, j’ai voté socialiste en utilisant le bulletin
d’Hidalgo, sans enthousiasme, mais comme une injonction aux plus
jeunes des responsables socialistes et des partis disséminés de la
Gauche à reconstruire ! Le Parti socialiste est mort et le scrutin
d’hier l’enterre. Pour incarner l’indispensable alliance
camusienne des libertés et de la justice sociale, il faut
RECONSTRUIRE le plus vite possible. Reconstruire un projet, une
méthode, une stratégie, une organisation.
Il
y a plein de méthodes pour reconstruire mais j’en vois beaucoup de
mauvaises et une seule de bonne. Si on croit qu’on va reconstruire
avec un dîner entre initiés ou en préemptant la candidature de
2027, on va dans le mur ! Si on met la charrue avant les bœufs, on
va dans le mur !
La
seule solution c’est le travail, le travail, le travail…
Pour
le deuxième tour, pour faire battre Madame La Peine, j’utiliserai le
bulletin Macron, toujours sans enthousiasme et même avec une
certaine colère. Car, franchement, « faire barrage à l’extrême
droite » avec un homme qui l’a faite passer en cinq ans de 20 à
30% au premier tour et, peut-être, de 35 à 47% au 2ème, tu parles
d’un barrage ! Si l’on voulait parler juste, on parlerait de
colmater le barrage qui fuit de toutes parts…pour retarder
l’échéance.
Macron
a le deuxième tour qu’il voulait, qu’il espérait, qu’il a
choisi et à bien des égards construit, mais cette obsession de
limiter le débat démocratique à ce face-à-face, ressemble à un
terrible jeu avec le feu.
Et
s’il a autre chose dans la tête que de jouer avec le feu et
retarder l’échéance, il lui appartient de changer de voie. Une
alliance avec la Droite ? Compte tenu de son programme délibérément
libéral et conservateur, ce serait le plus clair.
samedi 9 avril 2022
Lu « Ton absence n’est que ténèbres » de Jón Kalman Stefánsson , traduit de l’islandais par Eric Boury et paru chez Grasset.
rencontré de gros succès, notamment avec « Asta » paru en 2018.
Un de mes très chers amis, Yves LEBAS, arlésien d’adoption m’avait lancé une injonction quasi-comminatoire : « il faut que tu lises cela, c’est un bijou ». Et je me suis donc précipité chez le libraire……Pour la lecture, en revanche, point de précipitation : d’abord parce que c’est un sacré pavé de 600 pages, ensuite parce que c’est une écriture difficile, à la fois originale et audacieuse, parfois dérangeante - je me suis pris à relever les participes pour comprendre qui parle, un homme ou une femme … !-, enfin parce qu’on vit ces heures dans une ambiance lourde, grave, nostalgique où l’on rencontre à la fois des sentiments puissants et des destins tragiques: « la mort est la sœur de l’attente »…..
Et c’est une écriture, une littérature à bien des égards désarçonnante dans la mesure où les histoires humaines se croisent et se décroisent, d’une famille ou d’un amour à l’autre, d’un lieu ou d’une époque à l’autre, le tout formant un puzzle ou une mosaïque où l’ambiance générale emporte tout: car « ce qui compte, c’est de continuer les histoires qu’on a commencées »…..
Le décor est un fjord profond et sauvage de l’Ouest de l’Islande où sont installées quelques très rares fermes d’éleveurs de moutons. Mais il n’est pas interdit d’y retrouver des exodes vers la ville, le village plus loin, ou bien l’exil vers le Canada ou Marseille.
Et l’héroïne centrale du livre pourrait bien être l’écriture elle-même, présente mais discrète à travers quelques échanges entre l’auteur et un chauffeur de bus, l’écriture qui ralentit la course du temps….
mardi 5 avril 2022
Je suis allé hier au meeting d’Anne Hidalgo au cirque d’hiver.
Par
une sorte de fidélité très ancienne à ce qui fut longtemps mon
parti, et qui reste mes idées et mes convictions. Peut- être aussi
pour ne pas rater cette réunion des derniers des mohicans…en être,
quoi. Et peut-être surtout pour que ma présence soit un cri
d’espoir, une injonction à ceux qui vont être en scène demain,
après ce désastre annoncé, afin qu’ils s’y collent, vraiment,
non pas pour la lutte des places mais pour le travail de fond et la
réinvention d’une démarche, d’une stratégie et d’un
instrument au service des ces convictions. Le P.S. est mort avec le
quinquennat d’Hollande et ses dirigeants depuis cinq ans, plutôt
que d’engager ce travail de fond, n’ont cessé de différer ses
obsèques. Et c’est comme cela qu’on tombe de Charybde en
Scylla….
Le
discours d’Anne Hidalgo était de bonne qualité, sérieux,
argumenté, bien positionné à gauche, c’est-à-dire la gauche
européenne, responsable et réformiste, la gauche de gouvernement.
Oui, un bon discours, émouvant même à certains moments. En tout
cas, suffisant pour confirmer mon intention de voter pour elle au
premier tour.
Je
me suis d’ailleurs demandé si c’est bien ce type de discours
qu’elle tient depuis le début de la campagne, et donc quelle part
cette cohérence - ou éventuelle incohérence - pouvait avoir dans
l’échec annoncé. Si c’est le même et bon discours c’est bien
que le mal est ailleurs. Et ce sera la première des tâches des
reconstructeurs que d’analyser sans faiblesse les causes de cet
échec.
Et
dans cette analyse, je leur suggérerais de corriger le seul gros
défaut du discours de dimanche : la candidate socialiste a prononcé
10 ou 20 fois le mot « laïcité « ou l’expression « République
laïque » et je m’en réjouissais sans réserve. Jusqu’à ce
qu’elle énonce la loi de 1905 comme une loi « de tolérance et de
liberté religieuse»….patatras, voilà qu’ elle parlait comme
Hollande, Bianco ou…Macron et non pas en républicaine. Elle eût
évoqué la loi de séparation qui affirme et protège la liberté de
conscience que mes applaudissements eussent été sans réserve ! Car
la tolérance est un drôle de concept dont on ne connaît pas les
limites ( doit- on être tolérant avec l’intégrisme religieux ? )
et cette soi- disant liberté religieuse est une terrible restriction
voulue par la droite religieuse pour renier l’ambition de la loi
qui, avec la liberté de conscience, ajoutait à la liberté de
croire celle de ne pas croire….
Ce
n’est pas un détail, c’est même essentiel, mais je voterai
quand même pour elle. Comme un des derniers mohicans.
samedi 2 avril 2022
Lu « Connemara » de Nicolas Mathieu, paru chez Actes sud.
deuxième roman « Leurs enfants après eux ». Et « Connemara » en l’occurrence ne donne pas pour décor du roman cette somptueuse et sauvage région du Nord-Ouest de l’Irlande, mais….la chanson de Michel Sardou qui rythme les soirées de troisième mi-temps du club de hockey sur glace d’Epinal dans les Vosges. Hélène et Christophe s’étaient croisés au lycée de cette petite ville de province, même si Christophe était beaucoup plus intéressé par la meilleure amie d’Hélène. Mais leurs chemins se sont séparés après le bac : Hélène, très brillante, est partie à Nancy faire des études supérieures, école de commerce, belle situation, mariage bourgeois avec un sur -diplômé comme elle, famille, deux enfants, très belle maison, profession consultante, beau salaire…Christophe, lui, a privilégié l’enracinement sur place, les copains, le hockey, les troisièmes mi-temps, les bitures, et vit bien mais moyennement comme représentant de commerce en aliments pour chien. Il a eu un fils avec une femme qui est vite partie, et cohabite avec son père et son enfant en garde alternée.
Les hasards de la vie font qu’à la quarantaine, leurs routes vont se croiser et qu’un élan violent va les unir. Élan essentiellement sexuel ? Oui, mais pas seulement : la quarantaine est là et l’envie profonde de ne pas s’enfermer dans la routine, de tout remettre en cause, de prendre des risques. Seulement voilà : leurs routes les avaient conduits pendant vingt ans vers des contrées économiques, sociales, culturelles très profondément différentes et il n’est pas facile d’en faire abstraction.
Comme le précédent roman de Nicolas Mathieu, on ne voyage pas dans l’allégresse joyeuse des sentiments passionnels mais dans une mélancolie triste manquant parfois d’émotion. Mais c’est agréable à lire et tellement réaliste !