Je
pense chaque jour ou presque à François MITTERRAND et à tout ce que
nous avons vécu, collectivement, avec lui. À ce que j'ai vécu,
pendant 10 ans, à ses côtés, pendant 23 ans de militantisme
partagé, 17 ans de compagnonnage politique et, in fine, d'amitié.
Et, évidemment, le 10 mai, j'y pense encore plus.
Mais
je pense à lui souvent, en pensant à notre actuel président . Car
Francois MITTERRAND nous disait souvent : " vous voyez ces gens
qui vous disent qu'ils ne sont ni de Droite ni de Gauche ? Vous
apprendrez cette règle incontournable : en fait , ils ne sont ni de
Gauche...ni de Gauche !" . 40 ans après, on conviendra que la
réflexion de Mitterrand est plus que jamais d'actualité non ?
J'y
pensais notamment en regardant le portrait de Macron réalisé par
Bertrand Delais, un réalisateur de documentaire que je connais et
que j'apprécie, même si son obsession - respectable !- d'être "en
communion" avec ses sujets ne le met pas à l'abri, en la
circonstance, d'une tendance hagiographique évidente ....
Un
an après l'élection de Macron, Bertrand Delais nous propose donc un
portrait-bilan qui pousse naturellement à l'analyse critique en
essayant d'être honnête à défaut d'être objectif.
J'aime
bien, chez ce Macron mis en valeur par Delais, la politique étrangère
volontariste. Et même sa relation avec Trump ne me choque pas quand
il s'agit d'essayer jusqu'au bout d'essayer d'éviter le pire.
Personne ne peut lui reprocher d'avoir essayé. Même si face à un
homme qui nous refait le coup de Bush et des armes de destruction
massive en Irak - franchement, voir dans l'Iran le principal
financier du terrorisme, et ignorer ainsi, non seulement le schisme
entre le sunnisme et le chiisme, mais aussi les liens évidents entre
le sunnisme, le salafisme wahabbite notamment, et le terrorisme
djihadiste, c'est prendre le monde pour un benêt ! Ben Laden n'était
pas chiite . Al Qaïda n'est pas née à Téhéran !! - , même si,
donc, ces efforts sont vains, ils sont méritoires. Cela étant, il y
a des images de la visite à Washington où le paternalisme de Trump
à l'égard du Président français, met mal à l'aise.
Passons.
J'aime
bien, chez ce Macron mis en valeur par Delais, l'engagement européen,
assumé et courageux . C'est si rare depuis ... Mitterrand justement.
En même temps ( oui ! En même temps...), à entendre certains de
ses discours européens, je me dis d'une part qu'il sous-estime la
crise Européenne - Ah! Cette idée qu'un Ministre ou un budget de la
zone euro va redonner confiance aux peuples dans l'Europe...- et,
d'autre part qu'il ferait bien de se garder de cette arrogance
française qu'on nous reproche dans toute l'Europe.
J'aime
bien, chez ce Macron mis en valeur par Delais, cette incarnation du
pouvoir, cette autorité naturelle qui manquait tant à son
prédécesseur, cette capacité à penser la France et à parler aux
français de leur pays comme ce qui les unit ou les réunit, qui
manquait tant à ses trois prédécesseurs.
"En
même temps" (!..), il y a aussi dans tout cela une forme
d'arrogance qui se confirme peu à peu et dont le Président ferait
bien de se méfier.
D'abord
pour sa tentation technocratique, l'arrogance de l'inspecteur des
finances, très étrangère au vécu Des ( et non ce) citoyens,
ensuite pour son penchant monarchiste qui fait fi de l'importance
majeure, en démocratie, des contre-pouvoirs et des corps
intermédiaires. J'ai déjà dit, dans ces pages, combien je
partageais le cri - de colère?- de Laurent Berger, le dirigeant de
la CFDT, qui voit bien que la démocratie sociale est en danger et ne
s'y résigne pas. Attention...
Et
puis, il y a l'affirmation de Mitterrand : ni de Gauche, ni de
Gauche. C'est, désormais, tellement évident au plan économique,
fiscal et social. Les ordonnances sur le marché du travail devaient
instaurer la "flexisecurité" ? On a vu beaucoup de "
flexi" et bien peu de "sécurité". La politique
fiscale fait-elle de Macron le Président des riches ou des très
riches ? En tout cas personne ne s'aventure à dire qu'il est le
Président des pauvres ou, encore moins, des très pauvres... Quant
au plan social, parce que je préside encore - bénévolement !- un
office public d'HLM, j'ai déjà dit mon cri de colère et de révolte
contre une politique tellement technocratique qu'elle en est bête et
qu'elle sera inefficace.
Enfin,
il y a un point que, curieusement, Bertrand Delais occulte totalement
dans cette première année du quinquennat de Macron : c'est le
discours des Bernardins aux évêques de France. C'est curieux cet
oubli, non ? Je plaide, moi, que ce discours est hélas bien
éclairant quant à une conception de la République qui, justement,
n'est pas vraiment républicaine. Mais j'ai déjà dit pourquoi.