Je me suis tu depuis 10 jours sur « l’affaire » Cahuzac.
Sans doute parce que, l’âge
aidant, on ne se précipite plus pour réagir et qu’on acquiert peu à peu la
sagesse de prendre un peu de distance avant de s’exprimer. Nos anciens disaient
« tourner 7 fois la langue dans sa bouche … ».
Sans doute aussi parce qu’ils ont été si nombreux à s’exprimer ! Et
à dire tout et le contraire de tout, tout et n’importe quoi. A Droite comme à
Gauche, hélas…
Comme le disait –et le dit toujours - mon père : « il
vaut mieux fermer sa g…quitte à passer pour un c… que de l’ouvrir et ne laisser
aucun doute sur le sujet ».
Mais je me suis tu aussi parce que je connais bien Jérôme Cahuzac et que
son mensonge m’a sans doute plus abasourdi que d’autres …
Réflexions faites, que dire aujourd’hui ?
J’ai envie de m’adresser aux militants de mon parti, le parti socialiste
et, en particulier ceux de mon département, parce que ce sont ceux que je
connais le mieux et parce que je sais –ils me le disent, me le crient !...
à quel point ils se sentent blessés, trahis.
J’ai envie de leur dire des choses simples :
«Vous savez bien que nos vies personnelles sont faites de grands
bonheurs et de grandes joies, mais aussi de crises, de drames et de tragédies,
de douleurs et de souffrances.
Et bien la vie politique, c’est comme la vie ! Elle n’échappe pas,
elle ne peut pas échapper à cette règle. Voilà donc que cette vie politique que nous aimons tant, tous ensemble, pour
laquelle nous donnons tant de notre temps, de notre engagement, nous fait vivre
une épreuve particulièrement éprouvante.
Il faut y faire face. Avec lucidité et courage et, surtout, avec la conviction que la vie, la vie politique, ne
s’arrêtera pas là, que ce long fleuve qui n’est pas tranquille va continuer sa
route.
Soyons donc lucides : qu’est-il donc advenu ?
Une défaillance individuelle terrible. Une faute grave d’un éminent responsable
politique de notre camp.
Aucune, je dis bien, aucune excuse ne peut amoindrir la gravité de cette
défaillance, de cette faute.
Elle a eu un retentissement étonnant qu’il faut bien analyser. Après
tout, des fautes et des manquements dans la vie politique, on en a connu
d’autres. Mais pas avec ce retentissement. Pourquoi ? Peut-être parce que
l’homme était brillant, compétent, combatif et que nous ressentions collectivement
une grande fierté devant son travail. La chute n’en est que plus douloureuse.
Mais sans doute, surtout, parce que la situation économique est sociale
est ce qu’elle est. La crise est là, avec son cortège de souffrances sociales.
Et dans ce contexte-là, l’exemplarité des gouvernants est une exigence encore
plus forte, leurs manquements encore plus sévèrement condamnés. Combien de mes
électeurs m’ont dit des choses du genre : « Monsieur Glavany, vous
nous demandez de nous serrer la ceinture et là… » ou bien « Monsieur
le Député, quand je paye ma taxe d’habitation avec retard, j’ai une pénalité et
le Ministre, lui… ». Il faut entendre et comprendre ces messages.
J’en ai parlé à Jérôme Cahuzac, depuis ses aveux. Je l’ai fait sans
agressivité particulière mais sans indulgence non plus : je lui ai dit
qu’il fallait, qu’il devait payer sa faute ; et qu’il fallait qu’il ne
biaise pas, qu’il aille au bout du paiement de cette lourde dette à l’égard de
la société (je parle, bien sûr, de la dette morale). Parce que c’est normal quand
on est sensé servir son pays et qu’on le dessert… c’est à la Justice- et à elle
seule !- de dire maintenant ce que Jérôme Cahuzac devra subir comme sanction.
Ne soyons pas juges à la place des juges.
Mais cette défaillance est une défaillance individuelle ! Elle
n’est pas collective nous n’avons aucune raison de nous couvrir la tête de
cendres et de boire notre honte ! Aucune…
Alors, je sais bien que le peuple, nos concitoyens, nos électeurs se
tournent vers nous avec sévérité et excès : « Ah, vous les
socialistes ! Vous avez l’air malin avec votre compte en Suisse !...
Ils sont donc tous pareils, droite et gauche confondus…tous pourris ». Eh
oui, le « tous pourris » est de retour ! Et en force, ce
coup-ci.
Il faudrait, en plus, que l’on se fasse donner la leçon par ce Monsieur
Copé qui passe ses vacances dans la villa d’un trafiquant d’armes, fut un
avocat d’affaires aux méthodes très contestables et truque les élections de son
parti à grande échelle ? On croit rêver…
C’est là qu’il faut continuer dans la lucidité : non, les élus de
la République ne sont pas plus pourris aujourd’hui qu’hier et ne méritent pas
cet opprobre. Oui, l’immense majorité des élus est honnête et sert ses
concitoyens avec dévouement, et ne doit pas subir l’amalgame pour quelques
brebis galeuses….
Car c’est pour ces élus honnêtes et rigoureux que la souffrance est
encore plus grande : se faire traiter de « pourri » aujourd’hui…
Ne nous laissons pas aller, ne vous laissez pas aller à cette facilité !
Restons lucides.
Mais soyons courageux aussi ! Et agissons !
Voyez comment la démagogie médiatique s’est emparée du dossier :
une seule solution, la transparence. Rendez publics vos patrimoines !
Soit. S’il faut le faire, on le fera.
Mais on n’aura pas avancé d’un iota. Car la question n’est pas de publier, la question est de
contrôler !
Comme tous les élus d’une certaine importance, j’ai transmis aux
autorités compétentes, mes déclarations de patrimoine depuis 20 ans et plus.
Mais la commission concernée n’a
aucun pouvoir de contrôle !! Si on veut être efficace et ne pas se payer
de mots, il faut donner de vrais moyens de contrôle à la Commission.
Même chose pour le fisc : un élu qui a fraudé le fisc peut-il
rester un élu ?? Peut-on servir l’intérêt général quand on a failli dans
la première démarche citoyenne : déclarer ses revenus et payer ses
impôts ? Peut-on accepter qu’une « transaction amiable » efface
la fraude d’un élu de la République ? Hier, la droite les amnistiait…
Et ces paradis fiscaux ?? Qu’on me permette une litote : il
n’y aurait aucun compte en Suisse si ce pays jouait le jeu de la loyauté
fiscale ! Et l’Europe ne serait pas capable de prendre la Suisse entre quatre
yeux –comme l’ont fait les USA !!-
pour la mettre face à ses responsabilités ?? Les libéraux ont belle mine…
Voilà chers amis, chers camarades, ce qui nous attend : le combat
politique encore et toujours. Un combat qui nécessite lucidité et courage pour
que ces fautes ne se reproduisent plus.
Un combat qui doit vite, le plus vite possible, nous permettre de revenir
à l’essentiel : l’œuvre de redressement économique et de justice sociale
dont notre pays a besoin plus que jamais. C’est ça la vraie mission de la
Gauche.
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