jeudi 17 juin 2021

Déconfinement oblige ou, plutôt, déconfinement allant, les salles de cinéma réouvertes m’ont permis une cure de rattrapage de haute intensité pour voir quelques films de grande qualité

 

- « The Father » de Florian Zeller avec Anthony Hopkins et Olivia Colman. Il s’agit de
l’adaptation de la pièce de théâtre du même auteur, « Le père », et raconte la douloureuse apparition puis la progression de la maladie d’Alzheimer chez un homme, et les relations douloureuses que cela entraine pour sa fille. C’est tout à fait bouleversant, poignant, triste en diable, d’une humanité rare. Mais tellement vrai...Anthony Hopkins est éblouissant de vérité.

 
-« Des hommes » de Lucas Belvaux avec Gérard


Depardieu, Jean-Pierre Darroussin, Catherine Frot, adaptation d’un roman de Laurent Mauvignier. Un film sur les blessures psychologiques profondes, parfois violentes, des anciens combattants - français !...- de la guerre d’Algérie. De ceux qui ont tué beaucoup de « fellaghas », parfois au prix de méthodes expéditives insupportables, de la torture institutionnalisée en système, de ceux qui, aussi, ont subi des massacres d’une rare violence. Autant de barbarie dont on ne se remet pas comme ça. C’est un film bien fait, joliment joué, intense, dur.

 
- « ADN » de Maïwenn, avec elle-même , Fanny Ardant


et Louis Garrel. Le personnage central, Neige, mère franco-algérienne de trois enfants, vit une relation privilégiée avec son grand-père algérien qui l’a élevée et protégée de parents plutôt égoïstes et toxiques. A la mort de son grand-père, Neige va vivre une crise identitaire assez profonde et partir à la recherche de son «ADN »qui, bien sûr, va la ramener vers l’Algérie de ses racines culturelles, recherche contrariée évidemment par ses parents, mais accompagnée subtilement par son compagnon ( ou ex, je ne sais), père de ses enfants, joué par Louis Garrel avec talent. C’est du Maïwenn pur c’est-à-dire, de la sensibilité à fleur de peau, parfois un peu irritant mais le plus souvent touchant, émouvant et le tout parfaitement joué.

 
- « Garçon chiffon » de Nicolas Maury, avec lui-même et Nathalie Baye . Un jeune


homosexuel maladivement jaloux est aussi acteur, se sentant sous-estimé et sous-utilisé. La double occasion d’une rupture sentimentale douloureuse et d’une audition en perspective va l’amener à se retirer dans sa région natale, le Limousin, chez sa mère très envahissante, aimante mais pas toujours délicate, pour préparer cette audition. Il y a manifestement une part d’autobiographie dans ce film, mais je ne sais pas laquelle. Peu importe au fond. C’est d’une grande, très grande sensibilité que les homophobies pourront trouver geignarde, tant pis pour eux, mais dont la part féminine est assez touchante.

 
- Enfin, j’ai eu le privilège d’être invité à la projection en avant-première du film de


Jean-Michel DJIAN, « Edgar Morin, journal d’une vie », en présence du principal intéressé, centenaire cette année, bon pied-bon œil et esprit sacrément vif. Quelle vie ! Depuis la résistance ( dans le même réseau que François Mitterrand et Marguerite Duras dont les témoignages, dans le film, sont particulièrement émouvants), jusqu’aux plus hautes charges dans l’enseignement supérieur et la recherche, en France comme aux Amériques, quel chemin parcouru ! Et quelle pluridisciplinarité pour un homme qui a su développer une théorie de la complexité si précieuse ! Et élaboré une «Méthode » (en six volumes je crois) pour guider les intellectuels et les chercheurs dans leur appréhension du monde. A la fois philosophe, sociologue, économiste, anthropologue aussi ... un très grand intellectuel de son temps, dans son temps qui nous a, après le film, dit avec des mots touchants combien il se retrouvait là, dans ce film à la fois si différent à chaque âge de la vie et, en même temps le même.

Le film passera sur Arte très bientôt. Mais quel exploit que de faire tenir toute cette vie en 52 minutes !

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