samedi 31 juillet 2021

 

Dans ma retraite estivale, entre le Péloponnèse et la forêt landaise, loin des fureurs du débat public, je songe avec perplexité à cette polémique relative à la vaccination obligatoire. Et je commence par essayer de ramasser des souvenirs : je pense d’abord à ce « passeport international de vaccination » qu’on a très vite exigé de moi, jeune voyageur enthousiaste pour, par exemple, aller dans des pays exposés à la fièvre jaune. Une sorte de « pass-sanitaire » avant l’heure non ? Puisqu’il s’agit de prouver une vaccination pour entrer dans un pays….
Je pense ensuite aux « livrets de vaccination » de mes enfants . Je me souviens vaguement : diphtérie, tétanos, poliomyélite auxquels se sont ajoutés ensuite la coqueluche, l’hépatite B, la rougeole, les oreillons…. Je ne sais plus. La liste de ces vaccins obligatoires s’élève au chiffre « 11 » depuis quelques années et il parait que 70% des enfants les ont tous reçus, 80% si l’on s’en tient aux huit principaux.
Vaccination obligatoire également non ? Sans drame, sans heurts.
Alors je réfléchis à cette histoire de vaccination obligatoire pour les personnels soignants, dont je dis tout de suite qu’elle me parait comme ça, spontanément, tomber comme une évidence : que les médecins, infirmières, aide-soignantes qui nous soignent si bien se mettent à l’abri en même temps qu’ils nous mettent à l’abri en cas de pandémie, ça me parait juste du pur bon sens. Et, pour tout dire, cela me paraissait tellement de bon sens, que je ne comprenais pas pourquoi le pouvoir politique tardait tant à mettre en place cette vaccination obligatoire ! Alors, j’ai interrogé des amis médecins hospitaliers et j’ai découvert, je l’ignorais, que les personnels soignants avaient aussi depuis longtemps une longue liste de vaccinations obligatoires ! Avec une efficacité avérée, on me dit notamment pour enrayer les hépatites B d’origine professionnelle dans les années 70. Vaccinations obligatoires, sans drames, sans heurts.
Alors, comment se fait-il que le débat sur ce sujet atteint un tel degré de violence et de tension ? Au point que la déraison la plus choquante s’en empare quand on compare cette disposition à un apartheid, ou que certains manifestants se parent d’une étoile jaune ?? Provocations insupportables, inqualifiables, inacceptables, condamnables ( pour avoir longtemps fréquenté l’Afrique du Sud et étudié, là-bas, à de nombreuses reprises le désastre de l’apartheid, je reste tétanisé par de telles comparaisons… quant à cette utilisation révoltante de l’étoile jaune elle me donne envie de crier « Primo Lévi reviens, ils sont devenus fous ! »…) mais qui en disent long sur l’état de notre démocratie et du débat public.
Serait-ce, comme on le dit ça et là, que c’est la nature du vaccin et ce fameux « ARN-messager » qui provoquerait cette flambée ? J’ai du mal à le croire …si j’ose dire, je n’ai pas lu sur les pancartes des manifestants ni sur les réseaux asociaux ce slogan qui eût frappé mon attention : « les vaccins oui mais pas l’ARN ! »
Malgré tout, il doit bien y avoir, et ça peut être compréhensible, une méfiance vis-à-vis de l’accélération du progrès scientifique : un vaccin trouvé en moins d’un an, c’est presque trop beau pour être vrai non ? Faut-il y croire ? Sans les partager, je comprends ces réflexions.
Il doit bien y avoir aussi une sorte de « bofitude » classique : « bof, on verra ça plus tard » ou bien « bof, c’est bon pour les autres mais pas pour moi »…les réactions récentes d’afflux dans les centres de vaccination après les dernières déclarations plus fermes du Président montrent que cette attitude n’est pas négligeable.
Après, que les réseaux asociaux poursuivent à l’occasion leur œuvre destructrice de la raison et la rationalité, qu’ils alimentent les complotismes les plus divers à coup de fake-news, comment s’en étonner ? L’occasion est trop belle ….
Et que des partis politiques ou des politiciens en mal d’audience alimentent ce feu qui couve, ce n’est pas glorieux mais, à moins d’un an d’une élection présidentielle, c’est tout sauf étonnant…
Ce qui me navre le plus dans cette affaire, c’est qu’on en soit à rappeler des évidences : la liberté, la mienne, la tienne, la vôtre, s’arrête où commence celle des autres. On l’apprend dans les écoles et c’est même dans la déclaration universelle des droits de l’homme ! On a donc parfaitement le droit de ne pas se faire vacciner mais, dans ce cas, on reste chez soi et on ne met pas en danger la santé voire la vie d’autrui.
Vivre ensemble dans la République, notre bien commun si précieux suppose que l’on respecte tous ensemble nos droits ET nos devoirs. Nos droits et nos libertés certes. Mais aussi nos devoirs et, en particulier, l’ardente obligation de respecter les lois de la République qui sont l’expression de la volonté générale et définissent l’intérêt général. Oui, l’intérêt général au-dessus de nos intérêts particuliers. Ce ne sont pas que de vagues concepts généraux de philosophie politique, cela vaut aussi pour la vaccination…..

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