J’aime
bien Giesbert et depuis longtemps. Est-ce parce que nous sommes de
vrais
contemporains, nés la même année et que nos regards sur le
monde convergent d’autant mieux , ou parce que nos pères furent de
courageux combattants de la libération de la France, acteurs des
deux débarquements ( le sien était un GI débarqué à Omaha Beach)
? Est-ce parce que sa mère, dont il était très proche, était une
enseignante, prof de philo et socialiste et que cette influence l’a
marqué peu ou prou ? Je ne sais trop… Mais j’apprécie sa grande
connaissance de la vie politique contemporaine et ses éditos -ceux
du « Point » depuis quelques années- qui cherchent à élever le
débat. S’il lui arrive d’être sévère, très sévère, avec
les responsables politiques c’est toujours avec un respect, et même
une affection pour les personnes. Et s’il s’égare parfois à
être définitif, il lui arrive aussi de reconnaître ses erreurs.
Gallimard lui a donc commandé une « histoire intime de la Vème
République » en trois tomes, le premier commençant par un portrait
du seul Président que l’auteur n’ait pas du tout connu : De
Gaulle. Alors il est parti aux meilleures sources, celles des
ouvrages d’Alain PEYREFITTE, de Jacques Foccart, Philippe de Gaulle
et tant d’autres pour en donner un portrait tout à fait étonnant
où l’admiration évidente de l’auteur pour son sujet - et pour
son œuvre !- ne l’empêche nullement de décrire ses incroyables
défauts : caractériel, menteur, manipulateur, cynique évidemment,
violent , parfois même à l’excès, mais aussi parfois dépressif
et prêt à tout laisser tomber ou méprisant pour tel ou tel, voire
telle ou telle catégorie de français. Il y a deux moments forts
dans ce livre: l’Algérie et mai 68. L’Algérie et, en
particulier, la relation très étonnante de contradictions et de
trahisons réciproques entre De Gaulle et Salan ( un Salan,
d’ailleurs, que Giesbert réhabilite presque…) , l’Algérie
dont Giesbert démontre que, depuis le début, De Gaulle voulait se «
défaire » ce qui l'a amené à dire des choses étonnement
cyniques voir manipulatrices. Avec, en toile de fond, une sévérité
invraisemblable du général pour les pieds noirs….et Mai 68 où
l’on découvre De Gaulle usé, en bout de course, dépassé par les
évènements, prêt à tout lâcher jusqu’à son escapade à
Baden-Baden pour voir Massu et, là encore, très méprisant avec les
français qui, décidément, ne le méritaient pas. Giesbert aime
bien et, donc, châtie bien : il a aimé De Gaulle et l’assaisonne
donc sans vergogne. On brûle de lire les deux autres tomes qui
bénéficieront en plus des connaissances personnelles de l’auteur
avec ses sujets d’intérêt . Je me souviens qu’il avait consacré
un livre peu complaisant mais tout à fait honnête de Mitterrand
dans les années 90 dont j’attends avec impatience la réécriture
avec le temps qui passe….
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