Lu pour vous ces derniers
jours :
1. « La vie en mieux »
d’Anna GAVALDA paru aux éditions « Le dilettante ». J’étais –presque
– un inconditionnel d’Anna Gavalda, celle des débuts, de « je
l’aimais » ou bien de « Ensemble c’est tout ». De beaux
monuments de tendresse.
Et puis le déclin, « la
consolante », « l’échappée belle » … bof.
L’an dernier, éclaircie avec
« Billie », original précis d’humanité.
Voilà qu’on retourne non pas à
l’insignifiant, ce serait sévère, mais au « peut mieux faire » avec
ces deux histoires croisées et … banales.
2. « Quand la France s’éveillera »
de Pascal LAMY aux éditions Odile JACOB. J’ai connu Pascal il y a une
quarantaine d’années et on s’aime bien. Son parcours exceptionnel, longtemps
dans l’ombre de Jacques Delors – mais il y a ombre moins respectable … – puis
comme commissaire européen et, enfin, comme Directeur Général de l’Organisation
mondiale du Commerce, en fait une voix bien intéressante. Même si, avec un
plaisir qui frise parfois le masochisme, il aime titiller une grande partie des
socialistes français qu’il trouve bien peu conscients des réalités du monde …
Dans cet essai qui reprend à
dessein le titre d’Alain Peyrefitte sur la Chine , il jette un regard sans concession sur la France , non pas en tant que
français, mais comme citoyen du monde.
Et c’est décoiffant. Au bon sens
du terme. Ne retenons que 3 idées :
- en ce début de la décennie
2010, le PIB des pays dits « du Sud », qu’on appelait avant
« Tiers-Monde » dépasse, pour la 1ère fois depuis le 17e
siècle, celui des pays dits « du Nord » qu’on appelait auparavant
« pays développés ».
- l’Europe, c’est 7 % de la
population mondiale, 25 % du PIB mondial et 50 % des prestations sociales
versées dans ce monde ! …
- enfin, last but not
least : on dit la France
« désindustrialisée » avec 13 % d’emplois industriels. C’est moins
que l’Allemagne ou l’Italie certes. Mais les USA ou le Royaume-Uni, c’est entre
10 % et 11 % !!
Les meilleures pages sont sur
l’Europe et sa crise si profonde.
Et pour ce plaidoyer que je
partage tant sur le nécessaire couple franco-allemand comme moteur de l’Union.
Ceux qui l’oublient, – y compris chez
les socialistes français ! – oublient l’histoire, sans laquelle il n’est
pas d’avenir solide.
3. « La fête de l’insignifiance »
de Milan KUNDERA, paru chez Gallimard.
« L’insoutenable légèreté de
l’être » écrivait l’auteur il y a déjà quelques années. Nous y sommes
toujours.
J’ai toujours pensé qu’être
sérieux c’était de faire les choses sérieusement, sans se prendre au sérieux.
Mais chez Kundera, le sérieux,
voilà l’ennemi ! L’insignifiant doit triompher. Ces hommes qui se croisent
à Paris – beaucoup au jardin du Luxembourg … – à une époque indéterminée, et
qui expriment cette insignifiance des sentiments, se trouvent ainsi mélangés –
dans le récit – à d’ahurissantes conversations entre Staline et
Khrouchtchev ! Cette insignifiance-là peut plaire ou déplaire mais elle ne
laisse pas indifférent.
Et puis, comme c’est léger, c’est
facile à lire …
4. « Le collier rouge »
de Jean-Christophe RUFIN, toujours chez Gallimard. Le
médecin-diplomate-écrivain est décidément bien productif ces temps-ci. Un an
après « L’immortelle randonnée » qui eut le succès que l’on sait, il
nous livre un petit roman bien ciselé : 1919, dans une petite bourgade du
Berry, un juge militaire vient rendre visite à l’unique détenu de la prison
locale, militaire lui aussi, héros de la guerre. Il vient clore l’enquête et
délivrer le jugement sur des faits qu’on ne découvre qu’à la fin du livre.
Entre-temps, bien des rapports de forces psychologiques se nouent et se
dénouent … Intéressant et agréable.
5. « Tempête, deux
novellas », de Jean-Marie LE CLEZIO notre prix nobel de littérature.
Superbe écriture …
Deux histoires qui n’ont rien à
voir si ce n’est leur condition de jeunes filles abandonnées à leur
naissance : la première par son père, la seconde par sa mère.
La première histoire qui se passe
dans une ile d’Asie ou d’Indonésie est très émouvante. La seconde qui commence
en Afrique et se termine en banlieue parisienne est, tout simplement,
bouleversante. A lire absolument.
6. « SULAK » de
Philippe JAENADA chez Julliard. L’histoire fut bien documentée d’un ancien
légionnaire d’origine yougoslave, déserteur par inattention, devenu gangster
français, dans les années 70-80. L’homme a multiplié les casses par dizaines,
d’abord de supermarchés puis de bijouteries. Supérieurement intelligent, bourré
de charme, il avait une morale d’action : jamais de blessés, encore moins
de tués. L’intérêt du livre vient de son entremêlement permanent avec
l’actualité du moment et, surtout, de la distance affichée de l’auteur par
rapport à son écrit. Il s’arrête pour se commenter, se critiquer, insister ou
se mettre en doute. C’est très original même si la répétition des récits des casses
est un peu lancinante.
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