vendredi 11 octobre 2019

Lu " La maison" d'Emma Becker paru chez Flammarion.


Voilà un sacré livre, étonnant, très étonnant, original, atypique, dérangeant mais pétri d'humanité, de féminité, sensible, émouvant, parfois bouleversant. J'arrête là et je m'explique : Emma Becker est une jeune, puisqu'elle a une trentaine d'années, et très jolie, - ce qui n'est pas sans importance dans le livre-, écrivaine qui, après avoir déjà écrit plusieurs romans, est partie vivre à Berlin où, pendant deux ans, elle a vécu la vie d'une prostituée avec, d'entrée de jeu, l'idée d'en faire un livre. Et c'est cette vie, cette expérience qu'elle raconte avec une distanciation, une lucidité, et en même temps un engagement assumé tout à fait étonnants .
" La maison" ( cf le titre) n'est rien d'autre qu'un bordel de Berlin qui a pignon sur rue puisque les bordels sont autorisés par la loi allemande . Mais c'est une bordel "pas comme les autres" ( j'emploie cette expression avec prudence sur la base du récit de l'auteure qui a vécu, et raconte l'expérience d'un autre bordel que je qualifierais, pour être compris de "mafieux" et potentiellement violent).
" La Maison", elle, est une sorte de pension de famille, où l'on amène pas des clients racolés sur la voie publique mais où on les "accueille", où les femmes viennent librement et vivent une vie de groupe solidaire, amical, presque affectueux.
C'est déjà très étonnant à découvrir . Mais le plus décoiffant est, bien entendu, la manière dont Emma Becker parle des rapports avec les hommes, de sexe, et même de jouissance. (C'est très surprenant de la voir raconter comment, dans la vente de son corps à un rythme quotidien presque inhumain, il lui arrivait, parfois, rarement, d'avoir envie de jouir..... ou bien de l'entendre dire que ce rapport avec son corps lui a permis de mieux vivre les rapports amoureux qu'elle peut avoir en dehors de son métier) .
C'est cru, très cru, décoiffant, très décoiffant, dérangeant quelquefois. Mais c'est d'une telle liberté de ton et d'une spontanéité qui sonnent si juste que cela remet en cause bien des schémas établis et prouve au moins qu'il y a prostitution et prostitution. En tout cas elle assume le fait d'ouvrir ce débat. Bref, c'est le récit d'une femme libre qui est bien écrit, facile à lire au point d'être captivant, et mérite vraiment d'être lu.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire