mardi 22 janvier 2019

Je ne suis pas historien mais je me soigne...


Je me lamente chaque jour sur les lacunes de ma culture historique et je n'arrive à me rassurer qu'en déployant un intérêt, une appétence soutenue pour l'histoire. Et comme ces "cahiers de doléances ", aujourd'hui mis à la disposition des citoyens dans les mairies dans le cadre du "Grand débat" voulu par le Président de la République, me rappelaient un épisode de l'histoire de France - tout de même... -, je me suis dit qu'il pouvait y avoir un intérêt à y regarder de plus près.
Les cahiers de doléances, dans l'histoire de France , étaient des registres dans lesquels les assemblées chargées d'élire les députés aux États Généraux notaient vœux et doléances des mandants, et sont une vieille pratique qui remonte au XIVème siècle. Mais, bien entendu, les plus célèbres sont ceux de 1789, rédigés à la demande du roi Louis XVI en vue des États généraux convoqués pour le 5 mai 1789. On est donc dans la période immédiatement pré-révolutionnaire .
Pourquoi le roi provoqua-t-il ce processus ? La thèse la plus couramment avancée est celle de l'impasse financière dans laquelle se trouvait le royaume incitant le roi à imaginer un stratagème pour convaincre ou contraindre la noblesse - et le clergé?- à des contributions auxquelles elle répugnait.
Il est intéressant de noter que Michelet a fait une longue analyse de l'erreur politique commise, selon lui, par le roi qui, considérant le bon peuple comme son "obligé", aurait gravement sous-estimé les ressorts profonds de ce peuple et sa volonté non seulement de s'exprimer puissamment mais aussi de "prendre son destin en mains"....
De fait, 60.000 cahiers de doléances ont été rédigés ce qui apparaît comme considérable quand on sait d'une part que la population n'était que de 28 millions d'habitants et que, d'autre part l'analphabétisme et l'illettrisme y étaient encore prégnants...ils sont une mine d'informations extraordinaire dont raffolent les historiens sur la France de l'époque. Nos Archives, nationales et départementales , en sont très riches et ont publié une multitude d'ouvrages sur ces cahiers.
Le processus d'élaboration de ceux-ci était extrêmement décentralisé, dans toutes les communes, les paroisses, les sénéchaussées, les bailliages...mais reposait sur trois ordres : la noblesse, le clergé et, bien sûr, le tiers-Etat.
On trouve des traces très instructives dans les cahiers de chacun des ordres : la noblesse, avec des nuances bien sûr, s'y montre globalement libérale, au sens politique comme au sens économique....le clergé y dénonce la déchéance des mœurs et l'affaissement moral. Il y exprime ça et là un antisémitisme parfois violent....Quant au tiers-Etat, il exprime tout simplement ce qu'on appellerait aujourd'hui un "ras-le-bol fiscal", notamment à l'égard de la fameuse gabelle considérée comme particulièrement injuste, dénonce une Justice obscure et lente, exige des services publics efficaces, se plaint de la désertification des campagnes...

2019 : nous voilà 230 ans en arrière....
Soyons sages : comparaison n'est pas raison bien entendu.
Restons sages et voyons qu' il est des invariants qui frappent et poussent à la réflexion .
Et surtout, il faut imaginer la suite de l'histoire : la sagesse -encore elle- voudrait, si l'on veut éviter les explosions et les violences d'il y a un peu plus de deux siècles, que nos cahiers de doléances d'aujourd'hui ne soient en rien " l'enfumage" que certains craignent de bonne foi, que d'autres dénoncent par simple tactique, mais débouchent sur de vraies réformes faites de plus de Justice que de démagogie.

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