mercredi 28 novembre 2018

Lu...



Lu...le dernier Prix Goncourt, " Leurs enfants après eux"  de Nicolas Mathieu, paru chez Actes Sud ( encore un bingo pour la maison arlésienne dont la patronne n'est plus Ministre mais qui trouvera là un lot de consolation....).
 
Que dire de ce livre ? C'est du sérieux, presque une étude sociologique. Grave, puisque ça se passe dans une vallée de l'Est de la France touchée par les reconversions post-sidérurgiques. Triste puisque les personnages et, notamment, le jeune héros Anthony sont ternes, presque "a-sentimentaux". 
Bien écrit, encore que le genre " écrire comme parlent ces gens-là" n'est pas toujours convaincant. 
Long, sans doute un peu trop.
 
Il a été récompensé par des personnalités qualifiées...donc c'est un bon livre. Mais ce n'est pas un " beau " livre, un de ceux qui marquent et qui comptent. 
Et je m'étonne encore que Monsieur Bernard Pivot ait éliminé de sa sélection le magnifique " Le lambeau" de Philippe Lançon , sous prétexte que ça n'était pas exactement un roman, mais qui , lui, est un beau livre qui aurait honoré le Goncourt. 
Une occasion de perdue.

Vu " Bohemian Rhapsody",


le film de Bryan Singer qui retrace la vie du groupe musical Queen et de son
chanteur si emblématique, Freddie Mercury,  né à Zanzibar où je m'étais recueilli devant sa maison il y a quelques années, mort du Sida en 91 et enterré... au père Lachaise ! Autant dire qu'appréciant beaucoup cette musique de rock si créative et entraînante, ce groupe si original et ce chanteur à la personnalité décalée et touchante, j'ai beaucoup aimé ce film qui m'a, en particulier, profondément ému.

lundi 26 novembre 2018

Un édito que je signe ce jour pour " l'Aurore".

Réformer la loi de 1905 ? Attention danger....


Ainsi donc, après la Garde des Sceaux, le Ministre de l'Intérieur vient de le confirmer : le gouvernement sous l'égide du Président de la République s'apprêterait à réformer la loi de 1905 dite "de séparation des églises et de l'Etat". Avant d'en venir au fond, je voudrais faire quelques remarques préalables .
D'abord une réflexion de prudence : nous n'avons pas pour habitude à "L'Aurore" ni de nous lancer dans des spéculations hasardeuses à partir de rumeurs ou de bruits de couloirs, ni d'intenter des procès d'intention à quelque autorité publique que ce soit. Notre volonté, au contraire, est bien d'alimenter le débat public avec des contributions de fond aussi sérieuses et argumentées que possible. Or, à ce stade, nous ne connaissons pas le contenu réel du projet gouvernemental et nous ne pouvons pas, sérieusement nous prononcer à partir de "pseudo-fuites " d'un quotidien en mal de scoop. Nous le ferons donc, le moment venu, en livrant notre analyse approfondie au vu des propositions officielles et, dans l'attente, ne pouvons que lancer quelques remarques et avertissements préalables.
Rappelons que ce gouvernement et ce Président ne sont pas les premiers dans l'histoire contemporaine de la République à vouloir réformer la loi de 1905 ! Sans être désobligeant, Nicolas Sarkozy, avant eux, s'était engagé dans cette voie avec renfort de tambours et trompettes, employant d'ailleurs les mêmes mots que l'actuel Ministre de l'Intérieur, " il n'y a pas de tabou",.....avant d'y renoncer piteusement devant l'épreuve concrète de la tâche ! Alors, restons prudents et attendons de voir.
On peut néanmoins rappeler à nos ambitieux réformateurs que cette obsession qui est la leur - et de certains de leurs prédécesseurs - de "faire une place", comme ils disent, à la religion musulmane, puisqu'il faut appeler un chat un chat, s'est toujours heurté à une réalité incontournable : il est d'autres religions en France qui attendent à la porte de l'éventuelle réforme avec leurs listes de revendications dont certaines sont très anciennes, et qui non seulement n'attendent qu'une chose, que la porte s'entr'ouvre, mais en outre auront beaucoup de mal à admettre que celle-ci ne s'ouvre que pour une religion et par pour elles. Si j'ose dire elles sont dans la file d'attente depuis beaucoup plus longtemps.... Je pense en particulier à la religion protestante dont certains responsables ont rappelé publiquement et à juste titre cette vérité, lors de ces derniers jours. Il y a donc toujours un premier risque qu'un responsable politique ne doit surtout pas sous-estimer : celui d'ouvrir une boîte de Pandore dont on ne mesurerait pas les limites.
Venons-en au fond : s'il y a bien des articles de la loi de 1905 qu'il ne faut toucher à aucun prix, ce sont les deux premiers qui touchent aux principes républicains majeurs , "La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions...dans l'intérêt de l'ordre public" et "La République ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte". Ce sont les principes-mêmes de la séparation. Non seulement il ne faut pas y toucher dans la mesure où ils sont constitutifs du pacte républicain qui fonde la cohésion de la Nation, mais si l'on voulait bien m'écouter, on les "mettrait à l'abri" de toute volonté de réforme dangereuse....en les constitutionnalisant ! En 2012, je l'avais proposé à François HOLLANDE, alors candidat, qui l'avait accepté.....le temps de quelques jours . Le temps du discours du Bourget où cette annonce fut la plus applaudie - ce qu'il me fit remarquer lui-même...- , jusqu'à ce que les rédacteurs de son programme aient, avec son aval hélas, honteusement saboté cette proposition sonnant très vite l'heure des désillusions et des reniements.
Si l'actuel Président veut reprendre cette proposition, je l'applaudirais volontiers ! Sans tomber dans le piège du procès d'intention que je dénonçais plus haut, ça n'est pas exactement la philosophie qu'il a exposée dans son discours des Bernardins et je ne me fais donc pas trop d'illusion.
Restent les dispositions pratiques qui, dans les 42 autres articles de la loi, visent à appliquer concrètement ces principes. Ils ont fait, c'est vrai, l'objet de plusieurs révisions depuis 1905 et l'on ne voit pas qu'on puisse s'en fermer la porte, sous les réserves-mêmes énoncées plus haut. Mais à condition que l'on commence par se demander si une ou des modifications législatives sont bien nécessaires quant il s'agirait d'abord de faire appliquer fermement et sereinement les lois de la République. Le contournement de la loi de 1905 sur les associations cultuelles par celle de 1901 ? Une tolérance et des abus sur lesquels on ferme les yeux depuis trop longtemps. Les protestants de France qui sont, ne l'oublions pas, les principaux "bénéficiaires" du statut des associations de 1905 le savent mieux que quiconque. Fermer des mosquées, expulser des imams intégristes ne demande nulle loi nouvelle mais un peu de courage et de fermeté ! La République s'en trouve toujours confortée.
L'idée de "mieux contrôler" pour éviter les dérives intégristes ne me gêne pas, bien au contraire s'il s'agit d'impulser de la transparence, mais cette histoire de "label" accordé par l'Etat à ces associations me parait tout à fait contraire aux principes de séparation . Quant à savoir si des fonds qui financent des mosquées sont liés ou pas à des puissances étrangères, question que personne n'a jamais posé pour le Vatican, il me semble que la République et son bras séculier, l'Etat, a tous les moyens de le savoir sans user de quelque loi que ce soit.
On le voit, ce projet pose beaucoup de questions qu'il importera de regarder posément le moment venu, quand les intentions du Président et du gouvernement seront précisées. Là encore, je conseillerais volontiers à ceux-ci de se défier de toute forme d'arrogance et de vanité telle qu'on a pu en connaître dans un passé récent : " Moi je"... "Moi je vais régler la question de l'Islam de France là où tant de politiques ont échoué.."
Posons-nous la question : la question de l'Islam de France, de l'Islam en France ne se pose évidemment pas comme en 1905 quand cette religion n'existait que dans des départements d'outre-mer ou dans les " colonies". Mais elle ne se pose pas non plus comme elle se posait il y a 20 ans ! Ce qu'on appelait "l'Islam des caves" , faute de mosquées suffisantes, a complètement disparu de notre paysage. Sait-on qu'en vingt ans on a construit plus de 2500 mosquées en France ? Avec la loi de 1905 ! Il en va de même avec les prières dans les rues qui ont aussi disparu après avoir été trop longtemps tolérées. Sur tous ces sujets la République a su s'adapter sans se renier. Veillons à ce qu'elle poursuive dans cette voie.
Jean Glavany
Ancien Ministre , Président de l'Aurore.


Gilets jaunes ou démocratie sociale ?


Il est difficile de porter un jugement sérieux et serein sur ce mouvement dit des "gilets jaunes" .
D'abord parce qu'il est divers, très divers, qu'il regroupe des citoyens venus de tous les horizons politiques, et que ses revendications sont aussi très variées d'un département ou d'une région à l'autre.
Ensuite parce qu'il est "désincarné " au sens où il n'a pas de leader ou de porte-parole légitime, susceptible de synthétiser et porter ces revendications.
Enfin parce qu'il fait le choix d'un "désordre consciemment provoqué " qu'il est difficile d'approuver en République qui est un régime "d'ordre librement consenti".
Disons que tout cela exprime, dans une spontanéité plus ou moins "organisée" via les réseaux sociaux, un vaste " raz-le-bol" citoyen dont " la goutte d'eau qui a fait déborder le vase" semble avoir été la hausse de la fiscalité dite " écologique" sur les carburants.
Soit.
Et le gouvernement comme le President ne savent pas comment prendre ce problème qui leur échappe. Il faut dire : la fameuse goutte d'eau qui a fait déborder le vase est plutôt intelligente d'un point de vue de l'urgence climatique et revenir dessus serait non seulement se renier mais aussi tourner le dos aux vraies urgences.
Seulement voilà, la politique est parfois irrationnelle et le "ressenti " par les citoyens n'est pas toujours celui que voudraient les gouvernants si rationnels et raisonnables : dans ce moment, c'est la revendication sur le pouvoir d'achat qui emporte - presque- tout sur son passage. Et l'exécutif ne l'a pas vu venir car ces "ressentis-là" ne s'enseignent pas à l'ENA et nos inspecteurs de finances n'en sont pas les meilleurs spécialistes....
Il est néanmoins une première leçon que je tire de cet épisode qui n'est pas encore achevé : c'est que l'absence de démocratie sociale porte toujours en elle les risques de ces débordements spontanés et non maîtrisables. Et quand un exécutif, bardé de ses certitudes et de leur infaillibilité, fait si peu de cas depuis un an et demi de ces "corps intermédiaires" pourtant indispensables au bon fonctionnement de notre démocratie, il ne peut pas s'étonner de se trouver ainsi confronté à ces difficultés. On ne peut pas théoriser à l'infini sur..." les partis dépassés et archaïques, les parlementaires trop nombreux et qui ne servent qu'à ralentir les processus de décision, les élus qui ne pensent qu'à se faire réélire dans la démagogie et qui coûtent un pognon de dingue, les partenaires sociaux infoutus de s'entendre , les syndicats d'un autre âge qui ne comprennent rien à la modernité ".... non, on ne peut pas théoriser tout cela et se plaindre que la cocotte explose d'une manière ou d'une autre.
Car pour agir efficacement et durablement, il faut entraîner la société tout entière. Et pour cela la magie du verbe et l'outrance des certitudes assénées ne suffisent pas : il faut au pouvoir des relais pour partager les objectifs et les voies empruntées.



De ce point de vue, on ne peut que regretter la fin de non-recevoir opposée par le Premier Ministre, qu'on croyait plus sage, à  la proposition de Laurent Berger d'engager une négociation sur cette transition écologique. 
Oui, on attendrait volontiers que se lève un responsable politique qui dise haut et fort en ce moment : attention danger ! Il faut d'urgence retrouver les voies de la démocratie sociale !! Il faut d'urgence rétablir la confiance dans les corps intermédiaires qui sont indispensables à notre démocratie ! Il faut vite  donner à ces derniers du grain à moudre pour la négociation !
Oui, messieurs les gouvernants, ne voyez-vous pas que notre pays a besoin, plus que jamais, d'un contrat social ?

dimanche 18 novembre 2018

Lu “ Un déjeuner à Madrid” de Claude SERILLON, paru aux éditions du Cherche Midi.

On connaît l’ami Claude, journaliste de télévision longtemps, de presse écrite encore aujourd’hui puisqu’il est éditorialiste dans plusieurs grands journaux de province, écrivain prolixe, homme de conviction et d’engagements, ami délicieux au demeurant.

 Il livre ici un drôle de roman. Je dis “ drôle” pour son parti pris parce qu’il part d’un fait réel, un fait historique méconnu, un déjeuner en 1970 entre Franco, encore au pouvoir, et De Gaulle qui ne l’est plus depuis un an, pour en faire un roman. Mais un roman qui n’est pas que fiction car l’auteur a travaillé et scrupuleusement cherché tout ce qui a pu se dire ou écrire sur ce fait à l’époque, épluché tous les témoignages, afin que le dialogue, fruit de son imagination, soit le plus vraisemblable possible. Une sorte de roman historique , genre littéraire original et difficile. Et ce dialogue entre ces deux généraux vieillissants, dont les choix ont été si différents voire opposés notamment au moment de la seconde guerre mondiale, dans le contexte de l’époque soigneusement rappelé par l’auteur, ne peut pas ne pas intéresser les amoureux de l’histoire contemporaine. Et ceux pour qui le gaullisme fut une trace marquante de l’histoire de France, ne manqueront pas de s’interroger avec l’auteur sur ce curieux « dérapage » de De Gaulle . 
A lire, bien sûr.

samedi 17 novembre 2018

Un hommage à Jerome Robbins à Garnier.

    Hommage au grand danseur et chorégraphe new-yorkais mort en 1998 à l’âge de 80 ans.

    Un hommage divers :
    Le premier ballet, «Fancy Free » sur une musique de Leonard Bernstein est une parodie de comédie musicale sans grand intérêt.

    « A suite of dances » sur des musiques de Bach est d’un autre acabit : un solo élégant dansé par Hugo Marchand, ou plutôt un pas de deux du danseur avec une violoncelliste éblouissante qui participe largement de la qualité du duo... joli ballet qui a 34 ans mais n’a pas vieilli.


    «Afternoon of a faun»
    Sur une musique de Debussyest beaucoup plus vieux puisqu’il a 65 ans. Mais ce pas de deux, joliment dansé par Myriam Ould-Braham et Audric Bezard est harmonieux et délicat. Presque émouvant.
    Enfin « Glass pieces » est un ballet enlevé et rythmé pour... 40 danseurs et danseuses sur une musique de Philipp Glass que je ne connaissais pas. Un ballet créé en 1983 . Plutôt agréable et mettant en valeur la profondeur du travail du corps de ballet.
    Bref, au total, un bien doux moment.

Suite d'un séjour parisien et culturel :


- vu l'exposition " Picasso, Bleu et rose" au musée d'Orsay. Très belle expo. Très belle et, en même temps, (puisqu'il faut désormais employer systématiquement ce balancier si officiel...) très ciblée : il s'agit d'une visite du travail de l'artiste sur une période très limitée, 1900-1906, c'est-à-dire quand Picasso a entre 18 et 24 ans, une période où il se partage entre Paris et Barcelone. 

Une période où l'artiste "se cherche" mais à partir d'un trait de crayon déjà admirable, où il affiche quelques influences notoires (Goya, Velasquez mais aussi Van Gogh ou Cézanne) où il rencontre les affres de son environnement social (la prostitution à Barcelone..) ou bien pleure la mort d'un jeune ami très cher, Casagemas qui s'est suicidé par dépit amoureux...une période où l'on voit apparaître l'Arlequin comme figure centrale de l'inspiration de Picasso, une période bleue avec le si classique tableau "la vie" avant la période rose. Vraiment, une très belle expo.

-je n'en dirai pas autant de l'expo Giacometti au musée Maillol.
Certes il y a quelques belles statues de Giacometti et, en particulier la célèbre " homme qui marche" ou bien "la forêt" mais elles ne sont pas si nombreuses....alors l'expo mobilise nombre de statues d'amis ou contemporains de l'artiste, belles statues d'ailleurs comme celles de Bourdelle, mais j'en suis sorti un peu frustré...



  • - enfin, à la Comédie française, un magnifique "Lucrèce Borgia" du grand Victor Hugo, dans une mise en scène de Denis Podalydès et des costumes de Christian Lacroix avec, notamment, Eric Ruf. Une très belle pièce, poignante, une belle mise en scène, des acteurs parfaits (même s'il faut veiller à la bonne compréhension quand on crie trop fort ou que l'on parle trop bas... éternel problème du théâtre..) . Et un texte qui a 150 ans - même s'il n'est entré au répertoire du français qu'en 1918- et qui garde tout son modernisme, son actualité, sa pertinence. 

    Ah la trahison ! Ah la vengeance ! Très beau spectacle.

Et, pour achever cette séquence..... «Depardieu chante Barbara » au cirque d’hiver.


Étonnant . Et même bluffant. Un Depardieu qui avoue ne pas être chanteur mais qui s’y colle avec un certain talent musical. Ça passe très bien de ce point de vue même dans les très aigus comme le «quand » de quand reviendras-tu ! 
Mais surtout un Depardieu étonnement tendre, délicat, émouvant. Presque fragile, ce qui laisse pantois connaissant le personnage. En tout cas, un fort bon moment malgré l’organisation déplorable qui laisse une longue file d’attente se former sur le trottoir sans vergogne, obligeant le spectacle à commencer très en retard. Mais bon, Depardieu et Barbara si bien réincarnée effacent tout cela...

Deux expos et un spectacle à voir :


- MIRO au Grand Palais. L'expo est immense et le nombre d'œuvres exposées considérable. C'est une magnifique occasion de revisiter la vie de cet artiste qui vécut si longtemps à Paris, qui fut l'ami d'Aragon, Eluard, Picasso, Matisse, Calder et tant d'autres et qui fut, évidemment, profondément marqué par


l'épouvantable drame de la guerre civile espagnole, lui qui réalisa pour l'expo universelle de Paris en 1937, le très grand panneau mural " El Segador" ( le faucheur) exposé en face du "Guernica" de Picasso. J'ai été très intéressé par les vidéos exposées où l'on voit de longs interviews de lui. 
À propos de "Bleu 1, Bleu 2 et Bleu 3" les œuvres monumentales peintes dans la dernière partie de sa vie, il dit "elles m'ont pris beaucoup de temps, pas tant pour les réaliser que pour les concevoir, les mûrir, les accoucher"... Très belle exposition.

-ZAO WOU KI au Musée d'Art moderne, un autre peintre étranger, chinois en l'occurrence, longtemps accueilli en France, plus récemment que MIRO.
C'est une peinture puissante, profonde, pas franchement gaie, mais qui ne "transmet " pas grand chose. En tout cas, qui ne me transmet pas grand chose sauf peut-être un tableau superbe " Quand le vent balaye la mer ".

- Et puis ce spectacle original de Fabrice LUCHINI qui lit - ou récite ! magnifiquement, comme d'habitude...- des textes de la littérature française entrecoupés de morceaux de musique classique joués par un violoncelliste et une pianiste italienne, par ailleurs ravissante. 

C'est un heureux mélange assez bien rythmé et animé par un LUCHINI qui avoue ne rien savoir de la musique classique et faire confiance aux musiciens pour choisir les "illustrations " musicales des textes. Ça prend parfois des tournures surprenantes ( pourquoi marier Debussy avec Baudelaire ?...) mais ça donne un spectacle bien agréable. " Et surtout, gardez votre dignité, c'est la richesse de la Civilisation française" dit le bon Fabrice à son public pour le remercier....

dimanche 4 novembre 2018

Lu " A son image " de Jerôme Ferrari paru chez Actes sud, une maison d'édition qui vient de récupérer sa patronne, un temps égarée en politique....tant mieux pour la maison d'édition.

Jérôme Ferrari revient en Corse pour ce roman comme pour celui qui lui avait valu le Goncourt en 2012 avec " Le sermon sur la chute de Rome" . Une Corse qu'il connaît bien puisqu'il y vit et y enseigne la philosophie. 

Un roman qui est un hommage funèbre - un roman sombre donc ...- à Antonia, une photographe Corse , morte à 38 ans dans un accident de la route au petit jour sur une route sinueuse de l'île alors qu'elle revenait de Calvi où elle avait fait les photos officielles d'un mariage et où elle avait retrouvé un légionnaire serbe qu'elle avait connue dix ans auparavant, dans un reportage sur le conflit en ex-Yougoslavie. Le prêtre qui va dire la messe de ses obsèques est son oncle, parrain , confident et ami intime. Et son oraison, comme le livre, est une occasion de revisiter la vie d'Antonia, " A son image" c'es à dire à l'image des photos prises par elle . Mais la vie d'Antonia était partagée entre les photos de mariage ou de reportages dans des fêtes  de villages qu'elles réalisait pour le quotidien de l'île, photos sans grand intérêt pour elle si ce n'est pour gagner sa vie,  et ses photos non publiées comme celles sur ces reportage dans les Balkans où elle croisa la violence, la vraie. Ajoutez à cela sa vie pendant longtemps avec un chef nationaliste dont elle s'était séparée par refus d'une vie à attendre ses retours de prison et par mépris pour ces querelles entre factions qui sont si loin des vraies misères du monde, un nationaliste qui mourra de cette violence Corse  souvent folle ....et ça donne à l'exercice du prêtre une couleur parfois décousue mais émouvante.

Exposition de Jean-Michel Basquiat à la Fondation Louis Vuitton.

L'œuvre incroyable d'un artiste dont la création n'a duré qu'une dizaine d'années puisqu'il est mort d'une overdose en 1988 alors qu'il n'avait que 28 ans à peine. 
Cet homme qui fut avec ses amis  Andy Warhol - mort en 87 à 59 ans, l'aîné  de la bande-,  Keith Haring - mort à 30 ans du sida en 1990- et quelques autres au cœur de cette Culture alternative que certains appelaient" underground" mais qui ne l'est pas restée longtemps et  dont New York était le berceau. 
J'aime cette peinture qui est d'abord un cri de colère contre le racisme et  l'esclavagisme de la part d'un homme de père haïtien et de mère d'origine portoricaine. 
J'aime cette peinture que certains diront naïve ou caricaturale mais qui est surtout expressive. 
J'aime cette peinture remplie de mots qui témoigne d'une angoisse de n'être pas assez compris. 
J'aime cette peinture d'un noir qui aime les grands champions noirs, Ray Sugar Robinson  ou Cassius Clay. 
Une très belle exposition.

Vu "Tartuffe" de Molière au théâtre de la Porte Saint-Martin dans une mise en scène de Peter Stein, avec Pierre Arditi et Francis Weber.

Pas la peine de s'appesantir sur cet immense classique du théâtre français, entré depuis trois siècles dans la culture populaire de notre pays au point de lui donner des mots comme " tartufferie" , symbole de cette attitude de celui qui affecte une dévotion et une vertu profondes pour mieux tirer avantage de son entourage. Une hypocrisie portée à l'extrême traitée avec talent par l'immense Molière et, finalement, d'une formidable actualité. 

Mais ce qui ressort de ce Tartuffe-là, ce sont deux choses :
- d'une part la mise en scène moderne et originale de Peter Stein , l'acteur et metteur en scène allemand si talentueux. Au prix de quelques coupes qu'on lui pardonne, à la fois moderne et dépouillé,  il fait de ce Tartuffe une pièce très actuelle  et bien rythmée, vivante et drôle à souhait . Bravo.
- d'autre part la cohabitation de deux acteurs qui sont des monstres sacrés du théâtre français , Francis Weber et Pierre Arditi qui, curieusement, n'avaient jamais joué ensemble. Ces deux géants sont magnifiques et semblent vraiment prendre du plaisir ensemble. Le public aussi !
À l'issue du spectacle, nous sommes allés les saluer dans leurs loges car il se trouve que je les connais un peu, pour Francis, mieux en ce qui concerne Pierre. Ils donnaient plus que l'impression, la certitude de s'être bien amusés ensemble sur scène. Le vrai théâtre quoi.

Lu " Salina. Les trois exils" de Laurent Gaudé, paru chez Actes Sud.

Laurent Gaudé est un des écrivains français contemporains parmi les plus talentueux. Depuis « Le soleil des Scorta" qui lui valut le prix Goncourt en 2004, il va de succès en succès. Je ne le connais pas mais pour l'avoir vu et entendu à plusieurs reprises dans les médias, je m'en suis fait un ami virtuel car c'est assurément une belle personne, un humaniste véritable . 

Ce dernier livre beau et émouvant , raconte l'histoire d'une femme, africaine sans doute mais ça n'est jamais précisé, ni les lieux, les dates ou l'époque non plus, qui aura vécu une longue vie d'errance solitaire et d'exils successifs marqués par les naissances de trois fils : un fils de la haine né d'un mariage forcé et d'un viol, un fils de la colère et de la vengeance, et un fils de la pacification avec sa tribu d'origine, fils donné en forme de pardon dans une scène bouleversante par la femme du seul homme qu'elle ait jamais aimé, nouveau chef de la tribu qui l'a tant répudiée...Un fils qui va raconter la vie de Salina lors d'une longue cérémonie d'enterrement qui les mène, en barque, accompagné par tout un peuple, jusqu'à l'île-cimetière où elle reposera, en paix, dans tous les sens du terme.
C'est vraiment un livre à lire.