vendredi 21 novembre 2014

Mes lectures

Lus, pendant quelques jours d'un long « voyage » :

- « Meursault, contre-enquête » de Kamel DAOUD aux Editions Actes Sud. Kamel DAOUD est un journaliste algérien – il écrit au quotidien d'Oran et ses éditos sont très lus – de 44 ans, qui a eu une idée très intéressante : donner « l'autre version » de « L'Etranger » de Camus c'est à dire se placer à la place de la famille du jeune algérien tué par Meursault sur la plage à Alger. Original et bien fait, le récit du frère de Moussa, vieil homme dans un bistrot d'Oran, pose bien entendu des tas de questions et réflexions sur la présence française en Algérie, la décolonisation, l'identité algérienne.
Roman à lire, même si l'écriture accroche parfois.

- « Ce sont des choses qui arrivent » de Pauline DREYFUS chez GRASSET.
C'est curieux, la première partie de ce roman se situe au même endroit et à la même époque que le « Charlotte » de Foenkinos : sur la Côte d'Azur sous l'occupation. « Ce sont des choses qui arrivent », sont, de fait, les affaires de famille dont on ne parle pas. Dans l'aristocratie française de cette époque – mais est-ce que cela a véritablement changé ? -, on taisait les égarements conjugaux et les naissances de « bâtards » (comme le mot résonne vulgairement).
Même, et surtout, si le père naturel est juif. Triste livre, très bien écrit.

- « Pas pleurer » de Lydie Salvayre, au Seuil qui a obtenu le Goncourt. Un coup de projecteur poignant sur la République Espagnole, à travers un échange à distance entre Georges BERNANOS, plutôt engagé du côté de la droite phalangiste mais très vite bouleversé par les éliminations barbares des républicains dans l'île de Majorque, et la mère de l'auteure, ou tout du moins de la narratrice, qui avait 16 ans en 36 et qui a vécu un été de rêve libertaire à Barcelone. On y voit décrits à la fois la violence insupportable du franquisme naissant avec la bénédiction coupable et compromise de l'église espagnole et, en face, les divisions invraisemblables des républicains entre communistes staliniens et anarchistes libertaires. C'est un très beau livre de témoignage sur cette époque. Et comme la mère de la narratrice vit en France depuis la guerre où elle devint réfugiée politique, c'est écrit avec un français « hispanisé » qui, parfois, est tout simplement de l'espagnol écrit comme il est parlé.Mais pourquoi donc l'auteure et l'éditeur ont-ils renoncé à traduire en français tous ces passages ??
Dommage …Mais cela reste un Goncourt mérité.

- « Voyage au bout de la nuit » de Louis Ferdinand CELINE, dans la collection FOLIO chez GALLIMARD. Le livre-culte de CELINE. Admirable. Même si les sentiments magnifiés par ce héros dans son périple sont bien peu estimables : la lâcheté, le racisme, le mensonge, l'incapacité de s'élever, à être généreux … Ça fait beaucoup.
Mais le livre est construit, cohérent, puissant.

- « De sang froid » de Truman Capote toujours dans la collection FOLIO chez Gallimard, traduit de l'anglais par Raymond GIRARD.
Le livre-culte du roman américain, tiré à plus de huit millions d'exemplaires, et inspiré d'un épouvantable fait divers : l'assassinat, en novembre 59 de la famille CLUTTER, dans leur ferme de l'ARKANSAS. Je ne l'avais jamais lu et je comble un vide.

- « La promesse de l'aube » de Romain GARY chez Gallimard. Ça date de 1960 mais ça vieillit bien. Très bien. La très belle histoire, autobiographique, d'amour entre une mère et son fils. Une mère qui, avant-guerre, se sacrifie corps et âme pour son fils, rêvant les plus belles choses pour sa destinée (« Tu seras écrivain, ambassadeur, héros ... ») jusqu'à la séparation de la guerre qui obligea le fils en question à la laisser seule et malade à Nice. Pendant toute la guerre, chaque mois il recevra une lettre d'elle. Une lettre d'amour et d'encouragement. A la libération, quand il rentre à Nice, il apprend qu'elle était morte depuis 3 ans et qu'avant de mourir, elle avait rédigé 250 lettres pour lui, confiées à une amie chargée de les envoyer mois après mois. Emouvant.

- « Un cœur simple » de Gustave Flaubert chez Louis CONARD éditeur.
Magnifique petit livre d'un classicisme délicieux, contant l'histoire d'une servante, dans un petit village de Normandie dans la première moitié du 19e siècle. Quelle formidable écriture ! Flaubert quoi.

- « L'immeuble YACOUBIAN » de Alaa EL ASWANY, traduit de l'arabe égyptien par Gilles GAUTHIER, aux éditions Actes Sud. Cet EL ASWANY est un nouveau Naguib MAHFOUZ ! Sa chronique contemporaine d'un immeuble du Caire et de ses habitants est un merveilleux conte des faits et gestes d'une population diverse où toute la richesse et toutes les avaries de l'Egypte moderne sont recensées. De l'autoritarisme fascisant à l'islamisme qui ne l'est pas moins en passant par la débauche et la corruption. Mais tout cela est d'une immense sensibilité.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire