contemporaine de la France qui, quoiqu’on en dise, ne fut pas totalement négligeable: les 10 premières années de la Gauche au pouvoir.
Mais deux responsabilités qui éclairent d’un jour particulier et passionnant cette période.
Car à Radio-France, l’auteur défrichait les premiers moments d’une réforme majeure engagée par la Gauche et que beaucoup de français - et de responsables politiques ! - ont oubliée : la coupure des liens entre le pouvoir politique et les médias publics. La fin de la ligne directe entre le Ministre de l’Information et le dirigeant de la télévision publique. La fin des titres des journaux télévisés rédigés par le Ministre…Oh ! Ça ne s’est pas fait du jour au lendemain ! Au début, même, des responsables politiques socialistes de haut rang n’admettaient pas disons « spontanément » les conséquences de cette liberté conquise sur la liberté de ton des journalistes….mais c’est surtout la Droite et le gouvernement de cohabitation de Jacques Chirac en 1986-88 qui n’admettront pas du tout cette liberté acquise et la remettront en cause brutalement dans un mouvement typiquement « réactionnaire », au sens premier du terme, avant que François Mitterrand et le gouvernement de Michel Rocard ne la remettent sur de bons rails. Les anecdotes rapportées par l’auteur sur la période de la première cohabitation sont, à cet égard, savoureuses avec des portraits acérés de Philippe de Villiers, François Léotard ou Edouard Balladur. J’emploie le mot « acérés » pour ne pas faire allusion à l’usage du vitriol….
Quant à la commémoration du bicentenaire de la Révolution, elle est tout autant politique dans la mesure où, là encore, la droite réactionnaire la boycotta d’une façon très sectaire. Pas toute la Droite bien sûr et, à cet égard, les éloges dressés à Philippe Séguin, Jacques Chaban-Delmas ou Lucien Neuwirth sont précieux et honnêtes. Mais, là encore, Chirac et la Mairie de Paris se montrèrent sous un jour bien peu républicains.
Pour eux, la révolution française c’était la terreur point. La fin de l’ancien régime, la déclaration universelle des droits de l’homme et le début de l’universalisme, les balbutiements de la démocratie et de la République, Valmy et le lien Armée-Nation…tout cela ne les intéressait pas.
Mais sont tout aussi savoureux à découvrir les liens que les responsables socialistes entretinrent avec la mission: François Mitterrand attentif mais soucieux d’en tirer le meilleur miel, Michel Rocard très bienveillant et, en même temps, moins mobilisé par ces grandes commémorations et le sens de l’histoire que par la bonne gouvernance, Chevènement focalisé sur le lien Armée -Nation, Lang obsédé par la récupération du succès…
Et puis, ce livre dense et riche raconte en détails la « querelle des historiens» qui vit s’affronter les deux grandes écoles, celle de François Furet et celle de Michel Vovelle, «la révolution est-elle un bloc à prendre ou à laisser? », «donne-t-on assez de places aux mouvements sociaux dans l’approche de ce grand moment de l’histoire de France? » ….ces pages m’ont passionné même si, je les ai trouvées parfois un peu ésotériques. Tous les lecteurs ne sont pas des historiens, personne n’est parfait…
Enfin je dois dire, mais là mon plaisir est inversement subjectif à ce que je viens d’écrire, que le récit des conversations de l’auteur avec François Mitterrand sur l’ensemble de la période et les deux grands dossiers abordés m’a captivé. Car, au fond on voit deux hommes qui ne se connaissaient quasiment pas en 1981, apprendre à se connaître après s’être mutuellement jaugés et nouer peu à peu une relation de confiance qui ne sera jamais une intimité mais fondée sur le respect, ça va de soi, et l’estime réciproque.
Un beau livre pour les historiens et ceux qui ne le sont pas mais se soignent…
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