lundi 25 juin 2018


Lu " Heurs et malheurs de l'autorité " de Henri Madelin, sous forme d'entretien avec Yohan Picquart aux éditions Lessius.



Henri Madelin est un jésuite, il fut même "provincial" des jésuites français c'est-à- dire à la fois leur chef et leur autorité de référence, politologue et écrivain. Il représente aujourd'hui l'Office catholique d'information et d'initiative pour l'Europe au Parlement de Strasbourg. Henri Madelin a été mon prof à Sciences Po et j'avais noué une belle relation intellectuelle avec lui avant de le perdre de vue. Je compte d'ailleurs profiter de cette lecture pour renouer des liens précieux pour l'athée que je suis. Il livre ici un ouvrage au caractère autobiographique centré autour de la question de l'autorité, celle qui se perd chez les parents comme chez les enseignants, celle qui devient rare chez les politiques quand elle est naturelle, celle qu'il ne faut pas confondre avec l'autoritarisme, celle des personnes qui comptent vraiment parce qu'elles "font autorité", celle qui ne se décrète pas et qu'aucune école ne peut enseigner. C'est sérieux et grave et pas "people" pour deux sous, tout comme l'auteur.

Lu encore " Parlez-vous cerveau ?" de Lionel et Karine Naccache aux éditions Odile Jacob, encore une transcription de chroniques radiophoniques  tenues par l'auteur sur France Inter l'été dernier. 


Je connais un peu Lionel Naccache, neurologue, Professeur à La Pitié Salpêtrière et chercheur à l'ICM, l'institut du cerveau dont je suis membre fondateur et administrateur. Mon petit " jardin secret " en dehors de la politique auquel je consacre de plus en plus de temps maintenant que la politique m'en laisse beaucoup. Il a tenu à écrire ce livre de vulgarisation avec son épouse qui n'est pas neurologue mais romancière, histoire d'être sûr d'être compris et convaincant. Et c'est assez réussi , permettant d'avoir un point assez exhaustif des progrès de la connaissance sur notre cerveau, cet organe de 100 milliards de neurones sur lequel on dit un peu tout et n'importe quoi. Très intéressant.

Lu toujours " Le lambeau" de Philippe LANÇON aux éditions Gallimard. 


Formidable livre d'une sensibilité exceptionnelle et d'une véracité bouleversante. L'auteur est journaliste à Libération et à Charlie Hebdo, mais il est aussi écrivain et cela se sent tant il aime l'écriture et le choix des mots. Le 7 janvier 2015, il était dans la salle de conférence de Charlie quand les deux terroristes djihadistes ont surgi et provoqué le carnage que l'on sait . Au milieu de tous ses compagnons morts, Philippe Lançon fut un des rares survivants. Rescapé miraculeux mais salement amoché de plusieurs blessures par balle aux bras et, surtout au visage, le bas de celui-ci, la mâchoire inférieure, véritablement explosé et béant. Commençait alors pour lui, en même temps que le deuil et la gestion d'un choc psychologique insoutenable, une longue et lente reconstruction faite de dix-sept opérations dont de nombreuses greffes, les longs séjours à l'hôpital de la Pitié Salpêtrière d'abord, des Invalides ensuite. C'est tout cela que l'auteur raconte, depuis ce qu'était sa vie avant le drame, les jours et les heures qui l'ont précédé, le moment de l'attentat et sa vie à partir de là. C'est raconté avec une grande pudeur, une humanité touchante, une sensibilité extrême. Ce livre est, de facto, un hymne mérité à la gloire des personnels hospitaliers, chirurgiens, internes, infirmières et aides-soignantes, psychologues et kinésithérapeutes, et un hommage plein de respect à leur dévouement et leur efficacité. C'est une autobiographie d'une très brûlante actualité et ça fait un grand livre .

J'ai lu aussi, dans cette période de grande lecture, " Faire mouche" de Vincent Almendros aux Éditions de Minuit. 

Ou comment faire de l'ambiguïté une vertu littéraire : un jeune homme retourne dans son Auvergne natale, où il n'est pas retourné depuis bien longtemps bien que sa mère y vive, pour le mariage de sa cousine. Curiosité : on ne sait pas pourquoi, il y revient sans sa femme mais avec une amie qu'il fait passer ... pour sa femme ! Pas grave puisque personne ne connaît cette dernière par ici. Alors on découvre une atmosphère lourde et oppressante, beaucoup d'arrière-pensées et de non-dits, de sous-entendus et de soupçons, dans une drôle de famille de la France rurale profonde. Sauf que...sauf que le problème, comme on dit, n'est pas là. Le problème, on ne le découvre qu'à la dernière ligne du livre et ça donne un résultat curieux. Je sais que certains raffolent de cette littérature-la. Elle me laisse plus perplexe. 

Et puis j'ai lu aussi " La vie secrète des arbres" de Peter Wohlleben, publiée un aux éditions " les Arènes" , le fameux best-seller traduit en trente-deux langues de ce forestier allemand.  

Comment s'organise la société des arbres, ces végétaux qui n'ont pas de cerveau comme les hommes ou les animaux, mais qui n'en sont pas moins des êtres vivants. Et qui, comme dans les familles, aident leurs enfants à  grandir - mais pas trop !..- , comme dans les sociétés solidaires, aident leurs congénères  voisins et malades à se nourrir, et inventent des stratégies sophistiquées pour se défendre contre les agressions animales ou parasitaires. C'est assez passionnant même si, parfois, cela verse dans le scientifique moins pédagogique. Et cela donne encore plus envie de se balader en forêt avec toujours plus d'attention à la vie secrète qui s'y niche.

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