lundi 29 juillet 2019

Mon regard se tourne vers la rive sud de la Méditerranée.



En Tunisie d'abord où vient de disparaître le Président Essebsi à 92 ans. Le vieil homme qui avait servi les régimes de Bourguiba d'abord, Ben Ali ensuite mais qui s'en était éloigné à deux reprises devant leurs évolutions autoritaires, était une sorte de social-démocrate mesuré, musulman croyant mais farouchement anti-islamiste. Il incarnait parfaitement la seule expérience de démocratisation encore en cours après les printemps arabes. L'exception tunisienne, ô combien fragile mais si attachante.
Je l'ai rencontré à plusieurs reprises et il était très chaleureux , merveilleusement francophile et les yeux rieurs. Je me souviens d'une conversation où je m'étonnais de son initiative politique, après son élection à la Présidentielle de 2014 avec le Parti qu'il avait créé, Nina Tounès ( l'Appel de la Tunisie) , marqué par un affrontement idéologique très ferme avec les islamistes d'Ennahdha et leur chef Ghannouchi, les appelant ensuite au gouvernement dans une grande coalition : " Je préfère les avoir à l'intérieur que dehors. Et puis les urnes ont tranché, il faut rassembler tous les tunisiens désormais" m'avait-il répondu. Sa seule faute aura sans doute été de vouloir imposer son fils comme successeur ce qui, dans une démocratie naissante, n'était pas un très bon signal....regardons de très près ce qui va advenir de ce pays si proche et si attachant dont l'économie est encore sinistrée. 
Mais le même jour, un peu plus à l'Est au large des côtes d'Al Khoms en Libye, le naufrage d'un navire a fait au moins 65 morts et plus de 100 disparus, l'ONU considérant ce drame comme "la pire tragédie humanitaire en mer Méditerranée cette année "... L'Europe, quoiqu'elle dise, porte une énorme responsabilité dans ce drame des migrants-naufragés, et pas seulement le détestable Salvini : d'abord parce qu'elle fait passer les considérations politiciennes avant l'humanisme le plus élémentaire et le droit maritime qui veut que l'on apporte secours à tout navire en détresse avant de s'interroger sur l'identité et le devenir de ses occupants ; ensuite parce que le système qu'elle a mis au point pour tarir ce flux de migrants repose sur une soi-disante collaboration avec les "autorités libyennes" . Mais il n'y a pas d'autorités libyennes !! Il n'y a que des milices surarmées qui se livrent à tous les trafics et à toutes les violences à l'égard de ces migrants. Les renvoyer là-bas, c'est les renvoyer à la torture ou à l'esclavage.
Dans ce tableau bien sombre j'entends pour la première fois une responsable européenne, Madame Mogherini , encore chef de la diplomatie européenne, préconiser des réinstallations et des retours volontaires " HORS DE LIBYE". Enfin ! ...en attendant, cette route maritime de migration est devenue la plus meurtrière du monde et sa mortalité continue de progresser.
 

vendredi 26 juillet 2019

Lu «Surface» de Olivier Norek paru chez Michel LAFON.


Je ne suis pas particulièrement friand de polar mais de temps en temps, je ne
déteste pas. Un peu comme j’aime une bonne série policière du genre «Engrenages»....C’est vivant, haletant et, surtout, profondément humain . Eh bien là, je suis tombé sur ce que j’apprécie le plus dans un roman policier : on est pris et on ne veut plus le lâcher ! Norek est un personnage intéressant, ancien humanitaire d’abord, flic ensuite, romancier désormais, avec un succès notoire. Il sait de quoi il parle.
L’histoire est celle d’une jeune officier de police aux stups, défigurée par un tir en pleine face dans une intervention contre un gros trafiquant de drogue, dont le traumatisme n’est pas que physique. Son dialogue long et multiple avec le psy de service, spécialiste des traumatismes des soldats victimes d’actes de guerre, est très bien vu. Sa hiérarchie, pour faciliter sa reconstruction, lui propose une mission plus ou moins bidon dans un commissariat au fin fond de l’Aveyron. Seulement voilà : là-bas, on ne se refait pas, elle fait resurgir une affaire de disparition de trois enfants datant de 25 ans à laquelle elle va s’atteler contre vents et marées.
Passionnant.

Dans la chaleur caniculaire de l’été , les amis de Marciac, à quelques kilomètres de chez moi, ouvraient hier leur festival par un concert de STING. Un monde fou, une ambiance de folie, un vieillard de 68 ans conservé à vous rendre jaloux, s’est donné sans retenue.
Je l’avais déjà vu sur scène il y a 25 ans et je peux l’assurer : cet homme-là, comme le bon vin, se bonifie en vieillissant ....

mercredi 24 juillet 2019

Lu " Les sept mariages d'Edgar et Ludmilla " de Jean-Christophe Rufin, paru chez Gallimard.


On sait tout ou presque de la vie publique de Jean-Christophe Rufin, médecin,
humanitaire, créateur avec d'autres de la belle aventure de Médecins sans frontières, conseiller de Francois Leotard, diplomate -il fut ambassadeur à Dakar-, écrivain prolixe, académicien....on en sait moins et c'est normal sur sa vie privée. Pourtant si vous allez sur Wikipedia vous verrez qu'il a épousé en secondes  noces Azeb, une éthiopienne dont il a eu deux filles et qu'il l'a même épousée ... trois fois après deux divorces. On peut imaginer sans audace particulière que cette expérience personnelle lui a inspiré son dernier livre qui raconte l'histoire amoureuse tumultueuse d'un français issu d'un milieu très modeste et devenu très riche, pas toujours honnêtement , grand rival de Bernard Tapie...et d'une Ukrainienne d'un milieu encore plus modeste, rencontrée lors d'un voyage entre copains dans l'URSS des années 60, qu'il retournera chercher pour l'épouser et la ramener en France. Elle y deviendra une très célèbre cantatrice. Ces deux-là se seront donc mariés sept fois - mais la dernière, au ciel, ne  peut être comptabilisée qu'au titre de la poésie - et, si l'on calcule bien, auront donc divorcé six fois. Parfois sereinement, parfois dans l'agressivité douloureuse....
Le tout donne un récit vivant, amusant, plutôt bien écrit et facile à lire, l'auteur se mettant en scène - narcissisme classique de certains écrivains - d'une façon didactique, parfois peut-être  un peu lourde, comme un enquêteur sur la trace de ses deux personnages . Un livre qui tranche heureusement avec le précédent livre que j'avais lu de Rufin (" Le disparu de Conakry" était-ce le précédent ?) que j'avais trouvé sans grand intérêt, presque médiocre. Tant mieux : Un bon livre de vacances....

mercredi 17 juillet 2019

La mort, à 66 ans, de Johnny Clegg, que les sud-africains surnommaient "le zoulou blanc",chanteur, danseur, militant anti-apartheid, ami de Mandela.


Sa chanson « Asibonanga" était un hommage au grand leader noir. 
Son refrain,
"Asibonanga, asibonang'mandela thina "disait " nous ne l'avons pas vu, nous n'avons pas vu Mandela" , racontant ces regards portés vers Robben Island, lieu de la longue captivité de Nelson Mandela sous l'odieux régime d'apartheid.
Dans ma vie politique, j'ai eu l'immense privilège d'être, en 1994, observateur de l'Union Européenne pour les premières élections libres en Afrique du Sud. Tiens, je me souviens, Christiane TAUBIRA était dans mon groupe. Avec nos chasubles bleues, nous allions de bureau de vote en bureau de vote dans les townships où s'étendaient les longues, très longues files d'attente. Souvenir éblouissant de ce peuple noir découvrant  la démocratie dans une forme d'enthousiasme grave. 


Depuis, si j'ose dire, je n'ai jamais quitté l'Afrique du Sud, m'y rendant à de nombreuses reprises, comme Président du groupe d'amitiés France-Afrique du sud, comme Ministre ou bien à titre privé. Et ce premier privilège fut suivi d'une série d'autres : j'ai pu rencontrer Nelson Mandela à plusieurs reprises, 4 ou 5 je ne sais plus, me donnant l'occasion de deux échanges personnels un peu plus approfondis , et nouant une - modeste - relation amicale  comme en témoigna son attitude , me reconnaissant chaleureusement lors de notre dernière rencontre. 

C'est dans ce cadre que j'ai croisé aussi Johnny Clegg, en Afrique du Sud, autour de Mandela, ou en France. Je me souviens , c'était il y a une vingtaine d'années, d'un concert privé de lui à Paris. Nous n'étions pas nombreux mais nous étions des militants enthousiastes. 
Et ce qui m'avait frappé chez Johnny Clegg, c'était son corps musclé d'athlète de haut niveau et son engagement physique impressionnant dans les danses Zoulou épuisantes...une belle figure de L'Afrique du Sud contemporaine disparaît et je revis tous ces moments avec émotion....

lundi 15 juillet 2019

Chronique d'une République ballotée par les croyances :



- la Ministre de la Santé se fait vilipender parce qu'elle a osé décider le déremboursement des médicaments homéopathiques. Mais personne ne dit que cette décision vient après un avis de la Haute Autorité de Santé. Celle-ci avait été créée par le législateur pour donner des avis scientifiques indépendants du pouvoir politique et des lobbies économiques. Ceux qui croient, car c'est une croyance contraire à l'avis des scientifiques, que ces médicaments ont une vraie utilité autre que l'effet-placébo, dénoncent cette décision. Alors, supprimons cette Autorité scientifique indépendante et laissons les lobbies exercer librement leurs pressions sur les politiques ! Faut-il laisser les croyances l'emporter sur le savoir?
  • la mort de Vincent LAMBERT , triste épilogue trop longtemps attendu d'une pénible affaire de déchirement familial autour d'un corps désarticulé, aura peut-être une suite puisque les avocats des parents du défunt annoncent qu'ils vont porter plainte contre le médecin . Là encore, les croyances mènent le combat contre le savoir médical... la République sera-t-elle à la hauteur pour défendre corps et âme ce médecin, membre de la fonction publique hospitalière ? C'est le moins qu'on puisse attendre d'elle...
    En attendant, mes pensées vont toujours vers la veuve du disparu, silencieuse et digne.

    - à Grenoble, un groupuscule de quelques islamistes provocateurs soutenus, comme toujours, par quelques gauchistes qui n'ont que foutre de la République et de ses règles, manifestent devant une piscine pour exiger de pouvoir porter un " Burkini" dans celle-ci et le Maire, écologiste dépassé par les événements, se réfugie derrière l'Etat pour exiger de celui-ci qu'il traite de problème pourtant municipal. Les croyances se confrontent au devoir d'un élu. Dans la plupart des piscines de France on interdit le port de " short" ou bien l'on impose le port de bonnets pour des raisons sanitaires mais lui déclare  qu'il n'a pas les moyens de répondre à la question . Cette faiblesse indigne devant ce qu'il faut bien appeler une provocation islamo-gauchiste aura les effets qu'on devine : quelques voix de plus pour Madame Le Pen.

mardi 9 juillet 2019

Deux performances d'acteur et un chorégraphe suédois :



- les performances d'acteur sont d'abord celle de Philippe LEBAS dans
Britannicus de Racine au théâtre Artistic sur une mise en scène de Christine JOLY (qui joue aussi une tirade du 4ème acte) : performance dans la mesure où cet acteur joue une dizaine de rôles avec pour seuls changements le timbre de la voix et une écharpe rouge qui devient fichu, écharpe, châle ou ceinture, ce qui, si l'on retire la tirade d'Aggripine au 4ème acte et l'intervention d'un Néron convoqué en video, doit représenter 1200 ou 1300 alexandrins...époustouflant; 

Mais aussi celle de Francis Huster au théâtre de poche à Montparnasse, dans Bronx, de Chazz Palminteri et une mise en scène de Steve Suissa : seul en scène lui aussi pour jouer tous les personnages de ce récit de la mafia sicilienne du Bronx, ce quartier longtemps mal famé de New York. Tout aussi époustouflant...



- Le chorégraphe suédois, c'est Mats Ek, qui revenait à Garnier avec un
programme en trois parties : "Carmen" sur la musique de Bizet avec Amandine Albisson, Florian Magnenet, Hugo Marchand et Muriel Zusperreguy, un ballet bien dansé mais qui transmet bien peu d'émotion ; " Another place" sur une musique pour piano seul de Franz Liszt qui nous a donné le plaisir de revoir danser l'ancienne étoile Aurélie DUPONT désormais directrice de la danse et qui, avec Stephane Bouillon, nous ont livré un pas de deux très bien léché et, peut-être, un peu plus émouvant ; enfin le " Boléro" de Ravel qui, pourtant sur une musique envoûtante, n'arrive pas à faire oublier la mémorable chorégraphie de Béjart.

À la sortie , bonheur de retrouver les amis Pietragalla et Julien pour entendre, autour d'un verre improvisé, les avis de ces deux grands professionnels, forcément plus exigeants que moi.....

mardi 2 juillet 2019

Le festival du journal intime que ma femme, Karine, a créé il y a deux ans à Paris vient de s'installer à Saint Gildas de Rhuys dans le Morbihan où il a connu un succès assez formidable.


J'ai été particulièrement ému par la lecture publique de Fanny COTTENCON de
différents journaux intimes consacrés à mai 68, qui ont permis de revisiter ces moments de l'histoire de France à partir de témoignages extrêmement divers, la conférence passionnante de Jean-Noel JEANNENEY sur le rôle des journaux intimes dans l'histoire et, pour finir, cet échange plein de tendresse entre  Claire CHAZAL et Jane BIRKIN, devant 600 personnes dans le joli jardin du presbytère du village, autour du journal intime que cette dernière vient de publier.
Et j'ai profité de ce festival pour lire, ou relire, trois ouvrages directement liés à ce festival : " Monkey diaries " de Jane BIRKIN, justement, paru chez Fayard, journal intime qui porte sur la période 1957-1982, dans lequel l'auteur dit tout de sa vie avec une touchante ingénuité, et notamment de son histoire avec l'homme de sa vie, Serge GAINSBOURG, fragile, infidèle et addicte à l'alcool. Un homme qu'elle a quitté un jour pour se préserver elle-même mais qu'elle a toujours aimé et qu'elle aime encore.
"Puisque tout passe" de Claire CHAZAL, paru chez Grasset n'est pas à proprement parler un journal intime encore que.....encore que sans l'air d'y toucher, par petites touches subtiles et sensibles, l'auteure dit tout d'elle. Tout ou presque : ses parents grands bourgeois pleins de principe, ce père adoré avec lequel le dialogue est si difficile, les hommes de sa vie et les ruptures douloureuses, la dépression, la maternité et un fils vénéré, la fin du journal de 20h et la rupture avec TF1 et, in fine, un compagnonnage à la fois complaisant et douloureux avec la solitude. Un livre de femme très sensible qui m'a beaucoup touché.
Enfin, j'ai profité de ce festival pour lire , ou plutôt relire - mais c'était il y a 55 ans ?...-
"Le journal d'Anne Franck" paru en livre de poche, sans doute le journal intime le plus célèbre de l'histoire de l'humanité. Bouleversant témoignage d'une adolescente juive , cachée avec sa famille et quatre autres personnes dans l'annexe d'une entreprise du centre d'Amsterdam entre 1942 et août 44 c'est-à-dire quand elle a entre 13 et 15 ans. Bouleversant témoignage où se mêlent les sentiments en éveil d'une adolescente à l'égard de ses parents, des premières menstruations et des prémices d'une sexualité naissante, autant que les réflexions sur la guerre et ce qu'elle et sa famille devinent des trains qui partent , remplis de juifs, pour des destinations inconnues.
Bouleversant témoignage qui s'achève en août 44, à la veille d'une descente de la Gestapo sur dénonciation et la déportation vers les camps où elle mourra du Tiphus avec sa sœur, après sa mère, quelques mois plus tard, en janvier 45. 
" Kitty", c'est le nom qu'Anne Franck donnait à son journal , confident de tous les jours, témoin exceptionnel  de cette destinée tragique comme il y en eut tant d'autres.

Un week-end de tourisme culturel en Occitanie...


En commençant par une belle étape à Cordes-sur-Ciel, dans le Tarn, que je connaissais depuis longtemps mais que ma femme découvrait. 
Cordes, bastide du 13ème siècle, haut lieu de résistance cathare lors de la croisade des Albigeois. Magnifique petit village niché sur son piton, remparts préservés, vieilles pierres si nobles, point de vue somptueux et panoramique sur les coteaux avoisinants. 
Puis, le lendemain, la découverte - enfin ! - du Musée Soulages à Rodez. Très beau geste architectural en plein centre-ville , qui n’a pas révolutionné l’urbanisme environnant comme le Gugenheim à Bilbao, mais qui embellit notoirement ce centre-ville et lui donne une connotation moderne qui se conjugue plutôt harmonieusement avec la cathédrale toute proche. 
Musée fort bien agencé autour des donations que l’artiste lui a légué. Il y a là des œuvres de toutes les « périodes » de l’artiste qui va bientôt avoir 100 ans ( cette année !) et qui doit vivre ce musée, construit de son vivant, comme une satisfaction particulière... Je n’aime pas tout de Soulages mais je dois dire que ce qu’il appelle «  l’outrenoir », que d’autres appellent « la lumière du noir » a parfois quelque chose de fascinant de profondeur. Et les vidéos où il explique certaines techniques de son travail - je pense à « l’eau forte » comme il appelle l’acide..-sont passionnantes. 
Il y a en ce moment , à coté de l’exposition permanente, une exposition temporaire consacrée à Yves Klein et ses bleus chromatiques si magiques. Conjugaison du bleu de Klein et de l’outrenoir de Soulage..
Au retour par Toulouse, arrêt chez les amis Kader Belarbi et Laure Muret, danseurs magnifiques et chorégraphes qui font un si beau travail au Capitole de Toulouse - travail curieusement et injustement méconnu par trop d’élus locaux et régionaux - et  qui savent recevoir avec une simplicité chaleureuse très touchante. 
L’Occitanie culturelle est bien belle...